Memories of murder est un thriller bien ficelé et efficace, reposant sur une histoire sordide qui a secoué la Corée dans les années 80. Le premier serial killer du pays a sévi dans un rayon de 2km faisant 10 victimes.
Memories of Murder déploie le déroulement de l’enquête absolument rocambolesque selon nos critères actuels. Chaos complet sur les lieux des crimes avec destruction des indices qui auraient pu être trouvés, amateurisme des deux policiers chargés de l’enquête et dépourvus du minimum de psychologie requis dans ce type de situation, fabrication de preuves pour résoudre l’affaire au plus vite, torture des suspects.
Le film nous fait passer de la brutalité ou du sordide aux scènes grotesques dont les deux détectives incompétents, Park et Cho, sont les protagonistes. Ils sont vite rejoints par un autre détective, Seo, envoyé de Séoul pour aider à faire avancer l’affaire. Très vite Park et Seo, deux hommes aux tempéraments et aux méthodes opposées se heurtent violemment l’un à l’autre. Park est volubile, pas très futé et sûr de lui ; Seo est silencieux, méthodique et ne se fie pas aux premières apparences. Mais quand des personnes sont confrontées à l’horreur jour après jour sans pouvoir y mettre fin, elles finissent par en être affectées. Au final, chacun des deux détectives va devenir un peu pareil à l’autre. Seo en devenant plus réfléchi et Park en se laissant déborder par la rage au point d’être prêt à franchir une ligne rouge et de perdre toute maîtrise de lui-même…
A travers les images, Bong Joon-Ho nous fait ressentir l’oppression et la frustration qui accompagnent l’enquête : une pluie battante sur un air musical qui annonce un nouveau meurtre, des oiseaux noirs qui tournent dans le ciel, un tunnel noir sans issue qui semble ne déboucher sur rien. Il nous fait également voir les choses à travers les yeux du tueur comme cette séquence éprouvante où le meurtrier, caché dans un arbre comme un prédateur prêt à bondir, hésite entre deux proies qui se présentent au même moment, l’une allant vers la droite, l’autre vers la gauche. Laquelle des deux sera la prochaine victime ?
C’est finalement cette phrase prononcée par une enfant qui nous donne le portrait de cet homme : « il avait un visage ordinaire, juste ordinaire ». Là au milieu de tout le monde, un homme au visage ordinaire que rien ne démarque est un monstre insaisissable…