Lorsque Park Doo-man et son coéquipier Jo Young-goo doivent faire face à un tueur en série, les deux inspecteurs se retrouvent démunis. Venant de Séoul, l'inspecteur Seo Tae-yoon tente de leur prêter main forte et d'apporter un peu de professionnalisme à l'enquête. Les indices se font rares, les suspects innocentés et les cadavres s'accumulent, mettant à rude épreuve les nerfs de nos trois jeunes inspecteurs. Le coupable, frappant toujours par temps pluvieux, semble insaisissable.
Memories of Murder est l'un des principaux films qui contribua à la renommée internationale du cinéma coréen. Second long-métrage de son réalisateur Bong Joon-ho, ce polar façonna également un style particulier que l'on retrouvera dans de nombreuses productions coréennes par la suite. Un polar sombre, où des policiers peu dégourdis tentent d'arrêter un criminel sadique commettant des assassinats extrêmement violents dans une ambiance poisseuse. La pluie et la nuit y règnent en maîtres, se faisant complices en cachant l'assassin et effaçant les indices.
Le récit de ce film est inspiré de faits réels qui défrayèrent la chronique dans les années 80 en Corée. Confrontés au premier serial killer de leur histoire, le pays mobilisa à l'époque près de 300 000 policiers. 3000 suspects furent interrogés au cours des cinq ans où sévit le tueur qui fit dix victimes.
Bong Joon-ho pointe du doigt un amateurisme criard des forces de l'ordre, incapables de préserver une scène de crime, obligés d'envoyer les échantillons aux USA pour des tests ADN et extorquant des aveux d'innocents sous la torture. Ce portrait au vitriol n'épargne aucun protagoniste car l'échec patent de l'enquête entraîne la frustration et la violence du policier des villes aussi bien que les policiers des champs.
Plusieurs plans marquent le film. Il y a bien sûr celui sur le chemin de fer, immortalisé par une superbe affiche. Mais c'est surtout la dernière scène qui laisse un terrible sentiment de défaite. Près de vingt ans se sont écoulés depuis les faits et Park Doo-man, devenu représentant de commerce, retourne presque accidentellement sur le lieu du premier meurtre. Il regarde dans cet espèce de tunnel d'évacuation des eaux, s'attendant presque à y découvrir à nouveau un cadavre. Rien. Et alors que l'ancien inspecteur semble retrouver une paix intérieure, une jeune écolière lui apprend qu'un homme est venu récemment pour jeter un coup d’œil dans ce tunnel et il disait se souvenir d'y avoir fait quelque chose il y a des années. L'ombre fugace du meurtrier plane une dernière fois dans ce paysage bucolique, insaisissable.
À l'instar des inspecteurs, un sentiment d'impuissance saisit le spectateur. Ce polar est une douloureuse course contre-la-montre, une effrayante partie d'échec entre un tueur méthodique et une police dépassée par les évènements. Memories of Murder est à ranger au rayon des classiques, ces films qui ouvrirent la voie à un nouveau genre.
Si Memories of Murder vous a plu, The Strangers de Na Hong-Jin devrait vous plaire également.