Malgré les échecs de ses derniers films au box-office (mais qui se rattrapent sur les ventes / locations de VHS), la Warner continue de croire en Steven Seagal. C’est donc 60M$US qui sont injectés dans Menace Toxique, Fire Down Below de son titre original et le résultat est sans appel, à peine 24.5M$ de recettes à travers le monde. Ouch, ça pique, c’est qu’ils sont vils ces faquins de spectateurs, ils n’en veulent plus de Saumon Agile on dirait. L’échec de ce film au box-office a d’ailleurs mis fin au contrat qui liait la Warner à l’acteur. Pourtant, j’ai pu lire ci et là sur la toile que c’était le dernier film décent de Steven Seagal et que c’était réellement à partir de là qu’il allait entamer sa chute vertigineuse vers les enfers cinématographiques du DTV bas de gamme. J’ai hâte d’y être. Qu’en est-il réellement au final ? Eh bien oui, contre toute attente, Menace Toxique est au final plutôt sympathique. Comme quoi, on n’est jamais à l’abri d’une petite surprise.
Seul et unique film cinéma de Félix Enriquez Alcala qui a fait tout le reste de sa carrière à la télévision entre séries TV et téléfilms, catapulté à la barre après que Uli Edel (Body, La Bande à Badeer) ait quitté le projet juste avant le tournage, la production de Menace Toxique n’a pas été de tout repos. Charcuté au montage jusque dans les scènes d’action qui ont été raccourcies, le scénario de départ était tout autre. Lorsque Bruce Willis était pressenti pour le rôle-titre, le scénario de Jeb Staurt était plus un drame avec des éléments policiers. Mais lorsque Seagal a remplacé Willis, on a demandé à Philip Morton de remanier tout ça afin que cela ressemble à un film de Seagal. D’ailleurs, Menace Toxique est dans la droite lignée de Terrain Miné que Seagal avait réalisé lui-même, avec cet agent de l’EPA qui tente d’empêcher une société malveillante de déverser des déchets toxiques causant des dommages à l’environnement dans le Kentucky. Un côté écolo prononcé au point qu’en Espagne, Menace Toxique a été présenté comme la suite de Terrain Miné, d’où le titre espagnol « En tierra peligrosa 2 ». », bien qu’il y a aille moins au forceps pour faire passer le message. Pour une fois, Seagal tente des choses dans son jeu. Son personnage est un peu plus « cool » qu’à l’accoutumée, il arbore des grands sourires, il est doux, il a des postures décontractes. Bon, il fait parfois un regard lubrique un peu étrange, surtout lorsqu’il interagit avec une enfant de 10 ans. Mais il tente, oui, même s’il ne réussit pas pour autant. A l’inverse, les seconds rôles sont intéressants, à commencer par Harry Dean Stanton, la jolie Marg Helgenberger (visage très familier grâce à la série télévisée à succès Les Experts), ou Kris Kristofferson qui apportent un peu de substance à l’ensemble. De manière générale, c’est toute l’ambiance du film qui est plus cool que ce que Seagal avait fait jusqu’à présent, avec cette romance mignonne, ou même avec cette bande son très country et/ou blues. Mais je vous rassure, lorsqu’il faut péter des bras et mettre en miette des hanches, il est là hein, il ne s’est pas ramolli à ce niveau-là, il est « aussi coriace qu’un pitbull » comme aime à le rappeler l’antagoniste du film.
Les scènes d’action demeurent très sympathiques, avec mêmes des courses poursuites motorisés franchement intéressantes, qui sentent bon la tôle froissée et les pneus qui crissent. Même chose pour les combats et les gunfights qui sont agréables. Attention, j’entends par là « seagalement » agréables. Mais à l’exception du final qui en chaine plusieurs, ces scènes d’action sont assez brèves car le film est davantage axé sur son histoire et ses personnages aussi simples soient-ils. Le film manque d’ailleurs d’un grand méchant dont les prouesses auraient pu égaler celles de Saumon Agile. Là, son personnage n’est jamais vraiment confronté à un quelconque défi. Le scénario est ultra simple, dans la lignée de bon nombre de films d’action des années 90, historie qu’il soit très rapidement compris par tout le monde sans qu’il y ait de gros efforts intellectuels à faire. Tout y est prévisible, ceux qui doivent se faire péter la gueule se font péter la gueule, ceux qui doivent mourir meurent, ceux qui doivent trahir trahissent, tout avance comme sur des roulettes et Seagal gagne à la fin parce que, merde, c’est Seagal. Il y a bien un petit arc narratif sur le passé de l’intérêt amoureux et de son frère, mais lui non plus n’est guère surprenant. Mais étonnamment, ça fonctionne, ça se laisse agréablement suivre et on se dit que, même sans les scènes d’action qui semblent parfois artificiellement rajoutées, ça aurait été tout aussi agréable. La mise en scène de Félix Enriquez Alcala est fonctionnelle, sans folie mais plutôt carrée, et sait réellement mettre en valeur les très beaux paysages du Kentucky à l’instar des plans de cette église en haut d’une colline. Alors oui, Menace Toxique a parfois un côté absurde, avec par exemple son personnage principal qui est à la fois pilote, agent de protection de l’environnement, charpentier, artiste martial et guitariste, mais ça a quelque part un côté satisfaisant, d’amusant et on se rend compte qu’on n’a pas vu les 1h45 passer.
Après le médiocre L’Ombre Blanche, Menace Toxique est un Steven Seagal plutôt honnête et divertissant. Était-ce le dernier sursaut avant la chute vertigineuse de sa carrière vers les tréfonds obscurs du cinéma ? Je vais continuer mon enquête…
Critique originale avec images et anecdotes : https://www.darksidereviews.com/film-menace-toxique-de-felix-enriquez-alcala-1997/