Qu'est-ce qui différencie le documentaire d'une œuvre filmique ?
M-P : Les Troisgros suit les protagonistes d'une enseigne, presque trois établissements, sur une journée, 16 heures résumées en quatre, avec un rythme qui prend son temps mais sans être long : du marché à la cuisine en passant par la ferme, tout le temps nous est fourni pour apprécier l'ambiance et la beauté des divers lieux, la richesse des couleurs à l'intérieur comme à l'extérieur, et même s'investir dans les discussions scotchantes de l'équipe. La caméra, jamais intrusive, présente un envers du décors instructif voire pédagogique : les coulisses de l'entreprise sont un assemblage de tranches de vie bourrées de gestes techniques, informations gastronomiques (prenez des notes si vous aimez cuisiner !), détours chez les fournisseurs locaux, anecdotes, rires, frustrations, histoires de famille, et contact attentionné avec le public. On notera la démocratie du travail d'équipe et la bienveillance des chefs, loin de l'ambiance toxique de certaines enseignes pourtant réputées.
Loin d'être une affiche publicitaire, ce film documente et montre, certes, mais possède sa propre identité visuelle (j'ai eu faim alors que je sortais de table) et une narration qui transmettent l'amour de la table de ces restaurateurs aux spectateur·ices. A voir absolument si vous vous êtes toujours demandé comment marche un restaurant !