L'école de la vie...

MERCENAIRE (13,8) (Sacha Wolff, FRA, 2016, 104min) :

Ce drame original intense présenté à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes 2016 (remportant le Label Europa Cinéma) nous conte l’histoire de Soane, jeune rugbyman Wallisien, bravant l’éducation brutale du père pour partir jouer en métropole.
Livré à lui-même à l’autre bout du monde, son odyssée le conduit à devenir un homme dans un univers qui n’offre pas de réussite sans compromission. Sacha Wolff (ancien élève de la FEMIS) réalisateur de documentaire s'empare de ce singulier destin d'affranchissement de l'autorité paternelle sur fond de rugby.
Ce parcours initiatique rempli d’épreuves (l’amour, l’argent, les obstacles moraux et physiques) accompagne tout le cheminement de Soane débarquant en France pour jouer dans le club de rugby de Fumel. D’emblée par un lent travelling la fiction se veut cérémonielle, deux hommes discutent devant un terrain de rugby, le décor et le ton est planté. La mise en scène précise, très réaliste alterne les descriptions des rites culturels de l'Océanie, les prises de vue caméra à l'épaule sur le terrain au plus près des joueurs pendant les matchs, et des plans plus classiques et lyriques pour la romance avec sa petite amie et le sacrifice du père. Sacha Wolff filme magnifiquement les corps puissants comme des représentations mythiques. Le cinéaste démontre avec acuité le beau combat d’un homme, les travers sociaux et collectifs du rugby, le code d'honneur de la raison du plus fort ainsi que le malaise des joueurs des îles pour s’intégrer en métropole. Le cinéaste s’appuie principalement sur le convaincant Toki Pilioko acteur non professionnel, comme une grande partie du casting, affaiblissant parfois certaines scènes qui deviennent moins éloquentes. Mais dans l'ensemble les interprétations sonnent justes et l'apport musical de l’opéra, tout comme les vibrants chants locaux maoris apportent une couleur et un charme indéniable à l'œuvre. Venez découvrir derrière le décor ce que cache réellement ce "Mercenaire" homérique...Un premier projet cinématographique qui marque des points, une œuvre violente, différente, percutante et tendre. Bel essai !