Merlin l'enchanteur faisait partie de ces films vus pendant ma jeunesse dont je n'avais presque aucun souvenir. Je me rends compte après l'avoir revu à quel point c'était ingrat de ma part, tant le studio aux grandes oreilles a réussi son coup. Pourtant, tout s'opposait à la réussite d'un long-métrage Disney dans les années soixante, c'était le creux de la vague, le studio préférant développer son empire dans des produits dérivés (parcs à thèmes notamment, le premier ayant ouvert en 1955).
Et c'est un dessin animé plein de vie qui nous est proposé : à travers l'apprentissage du jeune Arthur assuré par Merlin, l'on peut voir plusieurs transformations, toutes forts sympathiques et ajoutant chacune un enseignement important. Par exemple, la scène de la cuisine dans laquelle la vaisselle s'anime en rythme pour être lavée est vraiment sympathique, n'étant pas sans rappeler les expérimentations d'un autre jeune apprenti, nous enseignant (à travers la dispute avec Sire Hector) le respect de la différence. Une autre scène m'a beaucoup marqué, ramenant une tristesse enfantine : la scène de la transformation en écureuils. Cette scène est d'une beauté simple mais percutante, provoquant une véritable empathie à l'égard des deux petites écureuils roses tout à fait trognons.
L'une des grandes forces du film est bien évidemment son humour : entre le loup qui tente désespérément de croquer le Moustique, Archimède très juste en chouette éduquée, sans parler du Seigneur Pélimore, qui n’apparaît pourtant que très peu mais qui laisse un sacré souvenir avec sa moustache en balai brosse. Une autre de ses forces est l'exploitation de la thématique de l'enseignement et du savoir qui fournit son panache de phrases bien senties : "Ce n'est pas parce que nous ne les comprenons pas que les choses sont forcément mauvaises" ; "L'homme ne tire de leçons que du passé. L'histoire ne s'apprend pas à l'envers, elle est déjà assez trompeuse à l'endroit !". Mais ce qui m'a surtout frappé en revoyant Merlin, c'est la réussite des doublages et du dessin : visuellement, le film est très attrayant, musicalement il est intéressant et entraînant, mais en terme de doublage il est presque parfait. Une mention spéciale s'impose à Dominique Collignon-Maurin qui double Arthur et doublera 33 ans plus tard Hadès dans le film Hercule.
Il ne me reste plus qu'à évoquer le "méchant" de l'histoire, Madame Mim, qui n'est en réalité pas véritablement un méchant, mais bien plus un antagoniste au sens strict. De fait, elle ne cherche pas à nuire pendant tout le déroulement de l'intrigue aux personnages principaux, elle fait son apparition alors qu'il ne reste qu'une vingtaine de minutes au film. Et partant, elle est juste d'une incommensurable hystérie, et si en revoyant Alice hier j'ai été impressionné par la folie de la Reine de cœur, je ne peux qu'être bouche bée devant la complète mégalomanie de cette folle furieuse.
Alors oui, ça n'est pas le meilleur de tous, c'est loin d'être le plus mauvais, mais il a ce petit quelque chose en plus qui le distingue des autres, ce tout petit attrait qui le rend profondément attachant, humain, vivant. Et je me demande si ce petit quelque chose de rien du tout qui fait la différence ça ne serait pas la magie d'un dessin animé d'enfance qui garde tout son charme même une fois à l'âge adulte. Allez savoir, je suis peut-être quelqu'un de sensible en vérité.