Alors que le roi d’Angleterre vient de mourir, le ciel envoie à Londres une épée plantée dans une enclume. Seul celui qui saura la retirer sera digne de devenir roi. Tous les chevaliers du royaume se succèdent, mais aucun n’y arrive… Perdu au fin fond de la forêt anglaise, l’enchanteur Merlin attend un invité. Celui-ci, jeune page d’un seigneur local, ne le sait pas, mais il est directement concerné par les événements de Londres. Un destin incroyable l’attend, et c’est Merlin qui sera chargé de l’y mener. Non sans rencontrer quelques embûches et distractions…
Suite aux faibles résultats de La Belle au bois dormant, deux projets sont mis en chantier par les studios Disney : l’un est une pure comédie, Les 101 dalmatiens, l’autre est une révision de la légende arthurienne, d’après un roman de T.H. White, que Walt Disney avait l’intention d’adapter de longue date. Il faudra toute la ténacité du scénariste Bill Peet pour mener à terme cette adaptation arthurienne, annulant définitivement le projet Chantecler sur lequel travaillait alors Wolfgang Reitherman, un vétéran des studios entre les mains duquel échoira finalement le film de Bill Peet.
Si la persévérance de ce dernier aura donc porté ses fruits, on peut toutefois se demander quelle traduction concrète elle aura eu à l’écran, car il s’avère rapidement que de scénario, Merlin l’enchanteur est à peu près dénué. En effet, après avoir posé en deux minutes des enjeux très intéressants, bien connus de tous, avec le récit de l’épée dans l’enclume, le film s’étend en détours au mieux sympathiques, au pire extrêmement vains, jusqu’aux cinq dernières minutes où enfin, le récit retrouve un peu la noblesse qu’on aurait aimé lui voir acquérir un plus tôt. Certes, Revoir la légende arthurienne sous le prisme de la comédie a quelque chose de jubilatoire, seulement, Merlin l’enchanteur n’en fait rien d’autre qu’une succession de gags (certes souvent réussis), enchaînant des scènes terriblement répétitives (les leçons par la métamorphose).
Heureusement, ce sont les studios Disney qui sont à la production, et c’est dire que la qualité est au rendez-vous. Au niveau de l’animation, donc, aucun souci à avoir, et c’est toujours avec un immense plaisir que l’on se replonge dans ces décors signés Ken Anderson, et que l’on voyage en compagnie des personnages toujours aussi bien animés par les génies habituels du studio que sont Milt Kahl, Ollie Johnston et Frank Thomas. En outre, Merlin l’enchanteur marque la première collaboration des frères Sherman (futurs compositeurs des incroyables chansons de Mary Poppins) avec les studios Disney pour un film d’animation, et si la plupart des chansons reste encore assez oubliable, on garde toutefois précieusement en tête le sympathique thème C’est c’qui fait qu’tout tourne rond.
On excuse donc en partie l’absence totale d’évolution des personnages et les longueurs du film pour se concentrer sur cette qualité visuelle unique qui nous rappelle que l’on regarde un Disney, et pour retenir en priorité les vingt dernières minutes d’un film qui, jusque-là, ne semblait pas trop savoir où aller, mais se reprend finalement pour nous offrir les deux scènes les plus cultes du film : l’hilarant duel de sorcellerie entre Merlin et Madame Mime, et la sortie de l’épée de l’enclume. Deux scènes qui résument parfaitement l’esprit du film : un humour parfaitement soigné et une beauté visuelle grandiose, dont on aurait toutefois aimé voir la puissance émotionnelle un peu plus développée.