Tyler Perry s’aventure sur le terrain du film de guerre avec Messagères de la Guerre (2024), une œuvre qui relate l’histoire méconnue et pourtant captivante du 6888th Central Postal Directory Battalion, le premier bataillon exclusivement composé de femmes noires à servir l’armée américaine pendant la Seconde Guerre mondiale. Si le sujet aurait pu permettre une plongée nuancée dans une période charnière de l’histoire, mêlant contexte historique et lutte pour la reconnaissance, Perry, fidèle à son style, choisit une approche didactique et surchargée qui, malheureusement, tue le film de toute subtilité. Cette démarche s’inscrit dans une tradition hollywoodienne où le discours prime souvent sur la finesse artistique, ce qui ne manquera pas de susciter des débats passionnés sur la question de la représentation dans le cinéma contemporain.


Sur le plan visuel, le travail du directeur de la photographie, Tobias A. Schliessler (connu pour son travail sur Fences de Denzel Washington), est indéniablement une des grandes réussites du film. Les scènes se déroulant dans des entrepôts postaux encombrés, éclairés par des lumières tamisées, captent à la fois l’atmosphère oppressante du travail de ces femmes et l’humanité qui se dégage de leur solidarité. Cependant, cette réussite technique est trop souvent compromise par une mise en scène appuyée, où les ralentis émotionnels et les cadrages illustratifs alourdissent l’impact dramatique. Là où un cinéaste comme Ava DuVernay (avec Selma) aurait su mêler le personnel et le politique avec grâce, Perry tombe dans un excès de pathos à gerber qui finit par éclipser les véritables enjeux du récit.


Le jeu des actrices constitue un autre point de bascule. Bien que la distribution soit portée par des talents prometteurs tels que Taraji P. Henson et Aunjanue Ellis, leur performance est plombée par un script aux dialogues souvent artificiels et démonstratifs. On aurait pu espérer une exploration plus nuancée des dilemmes personnels et des discriminations systémiques auxquelles ces femmes faisaient face. Hélas, les arcs narratifs sont prévisibles, et l’ensemble manque de souffle. En somme, Messagères de la Guerre se situe dans une zone intermédiaire : un film avec des intentions nobles et quelques éclats visuels, mais qui reste à mi-chemin entre l’hommage sincère et la propagande woke maladroite. Pour ceux qui recherchent une œuvre véritablement poignante sur des figures marginalisées dans un contexte historique, on recommandera plutôt des films tels que Mudbound (2017) de Dee Rees, où l’émotion et l’Histoire s’entrelacent avec beaucoup plus de délicatesse, d’authenticité, et de... talents.

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