Critique : Metallica : Through the Never (par Cineshow.fr)

Les mauvaises langues argueront que ce n’est que du marketing. Que Metallica n’a plus la même âme depuis la sortie du Black Album, que le groupe s’essaye à un ensemble de mécaniques différentes finalement bien éloignées de l’esprit heavy metal du début des années 80. D’autres verront ces évolutions comme des adaptations, des tentatives, réussies ou non de ne pas s’endormir sur une notoriété acquise depuis longtemps, et de se remettre perpétuellement dans une position à risque. L’album LULU sorti en 2011 avec Lou Reed n’avait pas vraiment su convaincre ni la critique spécialisée ni les fans, mais le projet avait le mérite d’être différent, divergeant, osé. On ne pourra pas le leur reprocher. Dans ce contexte de recherche permanente d’ouverture vers de nouveaux projets et nouveaux supports, il est donc assez logique de retrouver Metallica au cinéma. Pas vraiment un concert classique (au même titre qu’un Glee 3D, One Direction, Justin Bieber etc…), pas vraiment un film non plus, Through The Never est une production hybride au croisement de la prestation live et de l’aventure de fiction. Un choix étonnant (et une nouvelle fois risquée) qui même s'il n’est pas du tout exempt de défauts, a la mérite de mettre en scène les "Four Horsemen" dans un écran vidéo IMAX 3D stupéfiant, où la démesure du son et de l’image se prête parfaitement à la puissance visuelle et sonore des shows du groupe.

Néanmoins, la question que l’on est en droit de se poser devant Through The Never, c’est bien la motivation à insérer des éléments de fiction en plein milieu d’un concert. Volonté de se démarquer des autres show diffusés au cinéma, d’innover, simple délire artistique sans réelle motivation, on ne le saura probablement pas. Toujours est-il que l’excuse du concert sert à Nimrod Antal, le réalisateur, pour intégrer une aventure fantaisiste d’un jeune roadie, devant accomplir une mission pendant le show. Véritable McGuffin, cette mission est surtout un prétexte pour illustrer les transitions entre les chansons, voire certaines chansons en elles-mêmes. Au fur et à mesure que le concert avance, la descente aux enfers du jeune garçon est crescendo au même titre que notre incompréhension devant les images qui nous sont données à voir. Sorte de mix entre la vision anarchique et apocalyptique de la scène finale de Fight Club, et une mise en images des sombres paroles du groupe (la tracklist + la fiction suivent un déroulé logique), on ne sait que penser de tout cela, d’autant que Nimrod Antal n’étant pas un génie ni de la caméra ni du montage, le résultat manque cruellement d’unité narrative... Ça, c’était pour la partie négative du film qui fort heureusement, n’est absolument pas la majeure partie de ce qui nous sera donné à voir.

Le véritable cœur de Through The Never, c’est bien un concert complet (ou presque) du groupe, arrangé avec tous les décors possibles et les effets scéniques qui vont bien pour en mettre plein la vue. Entre captation réelle et mise en scène de détails juste pour le film (qui n’apportent pas grand-chose d’ailleurs si ce n’est un peu de confusion), ce concert est un vrai moment de bonheur du fait de la multiplicité des angles de vues proposés, et portés par les 24 caméras autour de la scène centrale. Le résultat est sans appel, et le plaisir total. Pour ceux qui ont l’habitude d’acheter les DVD ou Blu Ray du groupe, sachez que Through The Never apporte son lot d’angles inédits par la présence sur scène et au plus près des musiciens des cameramans et autres grues. Jamais un concert n’avait semblé aussi immersif ! L’utilisation de la 3D aidant, il est possible de se sentir réellement impliqué même si son utilisation sert avant tout à apporter une profondeur de champs bienvenue pour sentir et ressentir l'espace de la scène. Dommage toutefois que le montage d’Antal semble être parfois en pilote automatique, provoquant un réel effet de redondance dans la construction des images. Coté tracklist, le concert fait la part belle aux vieux hits du groupe (très peu de morceaux de Death Magnetic ou St. Anger, uniquement Cyanide, laquelle est d’ailleurs hachée de nombreux éléments de fiction) et suit globalement l’ordre logique des prestations du groupe. Pour les plus fans, on sera toutefois étonnés de constater que le film / concert ne se terminera pas sur Seek & Destroy (chanson clôturant habituellement les live du groupe), mais sur Orion. Bénéficiant d’un traitement sonore particulièrement fin (heureusement), Through The Never peut revendiquer sans prendre trop de risque un son dévastateur assez proche de celui d'un véritable concert, qu’il conviendra d’apprécier à sa juste valeur en vous rendant dans les salles les mieux équipées à côté de chez vous.

Cette nouvelle sortie (au cinéma cette fois) de Metallica est évidemment un must-see pour tout fan qui se respecte. Même si l’on tire notre chapeau pour la prise de risque quant à la volonté de sortir des schémas traditionnels des concerts 3D, on ne peut toutefois qu’être un peu déçu devant le traitement fictionnel, qui même si en temps à l’écran reste bien inférieur au concert, perturbe l'ensemble plus qu'il ne le sublime. Les deux entités paraissent irréconciliables, tant et si bien que Through The Never s’apparente clairement à une œuvre bicéphale, cherchant clairement à se faire une place parmi les œuvres musicales et cinématographiques telles que les longs clips de Michael Jackson, Lady Gaga mais sans en avoir complètement l'étoffe (Nimrod Antal n'était sans doute pas la bonne personne pour cela). Mais en s’affranchissant de ce point, qui faisant pourtant la spécificité du film, le concert que livre les Four Horsemen reste du grand art, et honnêtement, c’est cela que l’on était venu chercher !
mcrucq
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le 30 sept. 2013

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Mathieu  CRUCQ

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