Metallica, au-delà d’être mon groupe préféré, ce sont des mecs qui ont un certain savoir-faire marketing pour décliner des produits à leur image. Guitar Hero, Monopoly, chaussures, flipper, etc. Bref les Four Horsemen ne sont jamais les derniers pour trouver un nouveau filon.
Aujourd’hui, je m’intéresse à leur dernier projet : un film à leur gloire usant des derniers formats à la mode, l’Imax et la 3D.
Metallica au cinéma, c’est trop rare pour ne pas se laisser tenter. On les a bien déjà entendu au détour de quelques films: Mission Impossible 2, Bienvenue à Zombieland, Projet X, Hesher ou encore L’Enfer du Dimanche. On a même vu les 4 membres du groupe dans le film The Darwin Awards. Mais un film qui leur est entièrement dédié (ils ont coécrit le scénario, tiennent les rôles principaux, signent la bande-son et sont sur 90% des plans), ça, jamais ! Alors ce film intitulé Metallica Through the Never, ça se présente comment ?
Je vais d’abord parler de la partie la moins intéressante, celle du « film » qui entrecoupe les scènes de concert. L’histoire est aussi bidon que le jerricane que se trimballe le personnage principal, Trip. Il est incarné par Dane DeHaan, le Evil Twin de Normand Thavaud (Norman fait des vidéos) déjà aperçu dans Chronicle et bientôt à l’affiche de la suite de The Amazing Spider-Man dans le rôle d‘Harry Osborn. Fils de Norman Osborn. Décidément, l’ombre de Norman plane vraiment sur le bonhomme. Bon, le mec est peut être bon comme acteur mais là, il a jugé pertinent d’avoir la même expression faciale tout le long du film.
Pour en revenir à l’histoire, Trip doit remettre de l’essence dans un camion et récupérer un indispensable sac à l’intérieur dudit camion pour Metallica. Sur sa route, il va croiser des anarchistes encagoulés bien vénères (heu… quel motif les mecs?) qui vont en découdre avec des flics anti-émeutes. Le tout avec un cavalier avec un masque sur la gueule dont le hobby est de pendre les piétons à des poteaux. Pourquoi pas, ça détend. Après, un mec s’immolera par le feu et se fera tabasser à mort. Mais ne sera finalement pas mort. Puis une poupée (clin d’œil à Master of Puppets ?) prendra vie. Ce sont des choses qui arrivent. Plus tard, trois coups de massue sur le toit d’un immeuble détruiront entièrement la ville, rien que ça. Et puis le roadie rentrera alors que le concert sera fini. Voilà.
Ah et vous vous demandez sûrement « Et le contenu du sac? ». Ben le sac n’est rien d’autre qu’un MacGuffin. Rien à voir avec un dessert de chez Ronald. Il s’agit d’un élément qui « détermine (ou donne prétexte à) l’action et se révèle d’une importance capitale pour les personnages principaux » mais « demeure largement ignoré par le spectateur ou le lecteur ». Comme par exemple la mallette dans Pulp Fiction ou la patte de lapin dans Mission Impossible 3. On ne connaîtra donc jamais le contenu du sac. Super.
Je tiens à souligner toutefois quelques images qui collent bien avec l’univers de Metallica. Que ce soit le cavalier de l’Apocalypse (les 4 membres du groupes sont d’ailleurs surnommés les 4 Cavaliers de l’Apocalypse) ou une dizaine de pendus dans une rue ravagée. Autre point appréciable, les raccords entre les scènes « on stage » et celles de l’histoire. Que ce soit par la musique, un fondu entre la foule des émeutiers avec celle du public ou bien les écrans du concert qui diffusent des images du film et la caméra qui vient s’y plonger, tout cela reste relativement bien ficelé. Pour ne rien gâcher, il y a une vraie cohérence entre l’action qui se déroule à l’écran et les paroles des chansons qui se jouent en live.
La 3D quant à elle donne un effet de profondeur assez appréciable, qui offre un bon rendu de l’immensité du stade et justifie quelques effets un peu kitsh (notamment avec les éclairs). L’Imax permet d’avoir un son plus puissant qu’à l’accoutumé mais n’a rien de trascendant, surtout après avoir vu Star Trek Into Darkness ou Pacific Rim.
En gros, l’histoire est inintéressante et inexplicable, mal jouée, mal ficelée, un vrai bad Trip (ça explique au moins le nom du roadie), mais avec quelques images qui collent bien avec l’univers des Four Horsemen et des raccords avec le concert parfois bien sentis.
Pour celles et ceux qui souhaitent découvrir un vrai film sur Metallica avec de la matière, je ne peux que leur conseiller le magnifique rockumentaire Some Kind Of Monster.
Maintenant, ce qui fait que Metallica est Grand, c’est sa musique. Alors, la setlist est-elle à la hauteur ? Oui mon général. Elle est variée et satisfaisante. Ce qui n’est pas forcément gagné pour un film d’1h30 car même après les avoir vu 4 fois en concert de plus de 2 heures chacun avec systémiquement des setlists différentes, il me reste encore plusieurs de leurs chansons que j’aimerais entendre en live… Metallica Through the Never emprunte à tous les albums sauf Load et St Anger (probablement les deux moins appréciés par l’ensemble des fans).
Autre choix appréciable : le générique de fin avec le groupe jouant le morceau « Orion », seuls sur scène et dans un silence religieux. Une magnifique interprétation en hommage au bassiste emblématique du groupe et compositeur d’ "Orion", Cliff Burton, décédé 27 ans jour pour jour avant la sortie du film.
Je déplore toutefois un choix étrange de chanson:
ATTENTION SPOILER
Lorsque le roadie s’immole par le feu et se met à tabasser les émeutiers, la chanson Fight Fire With Fire aurait été bien plus appropriée que Battery. D’autant qu’elles sont construites de la même manière (intro avec une guitare à la limite de l’acoustique puis la chanson se déchaîne).
FIN DE SPOILER
Quelques clins d’œil bien sentis viennent faire plaisir aux fans: l’arrivée en skate et la chute de Trip renvoient à la passion de James Hetfield pour ce sport et à ses nombreuses gamelles. Pendant une émeute, un interlude de quelques secondes à l’intérieur d’un musée d’art viendra contrebalancer avec humour la violence des affrontements urbains. Un clin d’œil à la passion de Lars pour les peintures.
J’ai bien apprécié la présentation rapide des membres du groupe :
James Hetfield, le chanteur et guitariste, fan de vitesse et de grosse mécanique arrive au volant d’un rutilant bolide qui crache des flammes.
Kirk Hamett a une guitare dans les mains qui saigne abondamment. Une image que n’aurait certainement pas reniée Lovecraft, auteur préféré du guitariste solo de Metallica.
Robert Trujillo triture sa basse en tapant des poses de gorilles avec des effets de vibration qui rappellent ceux de Scott Pilgrim. Une image qui colle parfaitement à la puissance du jeu de Rob.
Seul Lars Ulrich regardera le roadie de travers en continuant de marcher. Bizarre.
Le film peut donc se résumer à un concert de Metallica raccourci de 45 minutes. Mais vu que je me suis passé en boucle les concerts « Live Shit: Binge & Purge», « Cunning Stunts » (dont ils ont d’ailleurs repris la cascade du mec en feu avec le concert qui continuent avec des moyens techniques réduits) ou encore « Français pour une nuit », je suis rôdé à ce niveau-là. Le spectacle est toujours magnifique, les moyens sont là (pyrotechnies, lasers dans tous les sens, cercueils géants qui sortent du plafond, croix qui émergent du sol, statue géante qui s’écroule, etc.) mais peu surprenant. J’ai beaucoup apprécié la performance de la chanson Ride The Lightening qui m’a semblé avoir une puissance vraiment décuplée. Savoureux!
Le groupe est toujours aussi fou en live, très charismatique dans leur manière de jouer, de communier avec le public et de soulever les foules à chacune de leur approche de la fosse. Les 4 musiciens s’éclatent comme des gamins, leur passion et leur joie d’être sur scène sont vraiment palpables. Ils se donnent au maximum, avec notamment un Lars qui se déchaîne et sautille derrière ses fûts !
Les 24 caméras mobilisées se font aériennes (en témoigne le plan d’introduction), virevoltantes mais aussi au plus près de l’action avec un zoom maximum sur les instruments (tel un boxeur, en plus d’être sonné par la musique, on est parfois littéralement dans les cordes). Ça reste quand même une manière inédite et très agréable de (re)découvrir la bande de San Francisco.
Un concert très bien filmé, avec de gros moyens et qui rend justice à la puissance de jeu et au charisme du groupe sur scène. Ce live (raccourci de 45 minutes) est malheureusement parsemé d’une histoire totalement bidon pour vendre le projet comme un film et pouvoir l’exploiter au cinéma. Le tout en 3D et en Imax pour maximiser les profits… Pour celles et ceux qui n’aiment pas Metallica, vous pouvez diviser la note par deux. Mais vous pouvez aussi surtout aller voir un autre film du coup.