Sir Arthur Conan Doyle a tracé de son héros Sherlock Holmes un portrait si vivant (à tel point que certains ont cru qu'il avait vraiment existé) qu'il était facile de lui faire vivre d'autres aventures sans trahir le personnage ni l'esprit de son imaginatif géniteur. C'est exactement ce qui est proposé dans ce thriller victorien d'après Conan Doyle mais non adapté d'une de ses nouvelles.
Holmes y affronte un autre mythe de l'Angleterre victorienne : Jack l'Eventreur, qui lui aussi fut personnage central de plusieurs films, sauf que lui il a vraiment existé et commis des meurtres sauvages et sanglants dans l'East End londonien vers 1888 ; la réalité rejoint la fiction car Sherlock et Jack auraient très bien pu se rencontrer. Je suis même certain que si Conan Doyle revenait, il serait fier de ce film.
Il y a en effet tous les éléments réunis : les quartiers suintant la misère de Whitechapel, le fog qui embrume les ruelles humides et obscures, la population cockney directement sortie des gravures anciennes, un mystère qui prend plaisir à s'épaissir, et un casting de luxe. Holmes est interprété non pas par un Anglais, mais par le Canadien Christopher Plummer qui s'en sort fort bien avec la pélerine et la casquette à carreaux ; il a toutes ses qualités et ses défauts, le violon côtoyant la seringue, et il est assisté de son ineffable Watson campé par un James Mason vieillissant qui remplit à merveille cet emploi de comparse et de faire-valoir. Le reste du casting est occupé par des seconds rôles de prestige comme Donald Sutherland, John Gielgud, Susan Clark, Genevieve Bujold, Frank Finlay, David Hemmings et Anthony Quayle dont certains n'ont parfois que de petites scènes.
Le réalisateur s'est servi de la thèse la plus couramment répandue sur l'Eventreur, et réussit à faire évoluer son héros dans une histoire pas trop mal construite, plausible, aux rebondissements inattendus et d'une implacable logique, avec un dénouement dans la plus pure tradition du cinéma anglais de genre, en créant une atmosphère un peu épouvante assez fascinante au sein d'une reconstitution d'époque très soignée. Tout n'est pas parfait, mais ça se regarde vraiment sans déplaisir.

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le 14 juin 2020

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Ugly

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