Pas d’échappatoire

Critique avec spoil

Une tension constante, un fardeau lourd à porter que doit endurer Mickey. Elle n'a pas d’obligation de rester avec son père mais son amour pour lui, l'empêche de partir et c’est dans ce sens qu’on peut se dire qu’elle n’a aucun échappatoire. Face à la toxicité de son père qui sur une pente descendante n'est destiné qu'à empirer. Elle se doit de faire un choix, de penser à elle et à son avenir. Hank n'est pas un monstre mais comme on pourrait le dire avec cette expression américaine "is a mess", il pourrait penser au bien de sa fille mais au lieu de ça, sa peur de se retrouver tout seul prend le dessus.

Une fois de plus nous retrouvons un film sur l'effondrement du rêve américain avec une famille qu’on peut qualifier de “White Trash” vivant dans des caravanes. En somme, des motifs récurrents dans les films sur cette partie de la population américaine se retrouveront comme à l'accoutumé dans ce film. Hank se sent comme un raté, il est au chômage et passe ses journées à jouer aux jeux vidéos et à boire des bières. Le motif de la chasse est encore une fois ici présent, on parle aussi plusieurs fois de la guerre et de ses répercussions entrant en jeux dans la psychologie du personnage de Hank comme une partie de l'Amérique.

Ce qui est intéressant dans le film c'est la relation entre Mickey et Hank, alors que dès le début une tension s'installe, on s'attache à leur relation et on voit qu’un amour fort unis les deux. Cependant à mesure qu'avance le film on comprends que le cas de Hank est irrécupérable et l'impossibilité de voir un happy ending pour les deux personnages se profile. Mickey est face à un véritable dilemme et en tant que spectateur on désire la voir s'en sortir et partir faire ses études, cependant d’un autre côté on ne veut pas forcément qu’elle abandonne son père. L'attachement pour le personnage se fait assez rapidement tout comme Hank même si à la fin du film, nous comme Mickey devons accepter qu’il sera impossible d’arranger les choses avec lui.

A chaque discussion, scène entre les deux personnages, une tension est présente ce qui constitue pour moi l’un des points forts du film. A travers un plan en ocularisation interne on observe à la place de Mickey son père, on comprends à travers ce plan qu’elle l’observe avant d’entrer en interaction avec lui pour savoir à quoi s’en tenir, est ce que son père est dans un bon ou un mauvais jour ? En voyant Hank entrer dans le champ on ressent une certaine angoisse, s’étant attaché au personnage nous voulons voir la meilleure partie de lui-même. Ainsi en voyant à travers les yeux de Mickey à travers l'ocularisation interne, on s’identifie complètement à elle et à ce qu’elle ressent. Plusieurs plans montrent les différents visages de Hank quand Mickey quitte le cadre. A deux reprises alors qu’elle est hors champ, on le voit changer d’attitude, une fois pour aller se resservir de l’Oxy et une autre fois après avoir arrosé complètement Micke quand il passe du rire aux éclats à un visage triste. Ses deux scènes résument pour moi parfaitement son personnage avec la première facette qui est son instabilité et la deuxième concernant l’expression de ses émotions. En effet Hank est un personnage qui cache beaucoup ce qu’il se pense, il se défile quand à l’expression de ces émotions (cf : les scènes ou Mickey parle de sa mère, il semble être détruit par le décès de cette dernière et en choisissant de ne pas faire face à ses émotions ça l’impact fortement).

Première scène du film établit directement le milieu sociale, la misère du quotidien des deux personnages, ce qui sera en toile de fond tout le film. La société ayant une part de responsabilité dans la situation de Hank et Mickey, les inégalités sociales, l’ignorance des médecins, les conséquences de la guerre,etc… Dans cette histoire de ces deux laissés-pour-compte, celle qui doit en tirer le plus les conséquences c’est évidemment Mickey qui doit renoncer à ses rêves si elle ne veut pas avoir à abandonner son père. Elle se voit alors déjà suivre le chemin de son amis, tombée enceinte et à l’aube de devoir entretenir un foyer à un très jeune âge. Les perspectives d’avenir sont maigres pour elle étant donné le prix à payer pour faire des études et le fait qu’elle dépende de son père qui ne fait pas attention aux finances. L’affection que Mickey a pour son père rentre aussi dans le cadre du deuil, qu’ils partagent depuis la mort de la maman de Mickey. Elle est la seule à pouvoir s’occuper de lui ce qui constitue étant donné son état dégradant un lourd fardeau. Le dernier plan du film représente une véritable délivrance pour Mickey, la caméra devient instable, c’est pas Mickey qui doit s’adapter à la caméra mais la caméra qui doit s’adapter à Mickey et à son envolée.

La fin laisse totalement le destin de Mickey en suspens, elle choisit de s’échapper de cette vie dont elle était jusque la prisonnière. On peut considérer que la fin se finit donc sur une note d’espoir mais d’un autre côté on peut aussi penser que ça va être très difficile pour Mickey et qu’il y a des risques qu’elle n’arrive pas à s’en sortir.