Avant d'aller voir ce film, je me suis penché sur la filmographie de Jeff Nichols en visionnant Take Shelter. La représentation de la famille et la très belle photographie ont retenu mon attention, et ce sont deux éléments que j'ai retrouvé dans Midnight Special. Je ne sais pas si ce sont deux caractéristiques du réalisateur mais c'est très bien, il peut tout à fait continuer à faire des films dans cette lignée s'il le souhaite.


La famille ne bénéficie pas du même traitement que dans Take Shelter, elle est moins importante. J’irais même jusqu'à dire qu'elle est laissée de côté, et c'est ce qui fait sa force. Il n'y a pas d'insistance dessus, même pas de discours sur les valeurs familiales, on a juste un père et une mère qui aiment leur fils et qui essayent de l'aider. C'est simple, concis, et le film n'en avait pas besoin de plus pour montrer les liens forts qui unissent les personnages.


La photographie, quant à elle, est une nouvelle fois supervisée par Adam Stone, collaborateur de longue date de Nichols. Les images sont donc, sans surprise, jolies et bien composées. Le chef op a insisté sur l'éclairage, en travaillant les sources de lumière artificielles. Ainsi, de nombreux phares, néons et lampes torches viennent découper la nuit sombre pendant laquelle se déroule une bonne partie de l'intrigue.


Ces éléments visuels ne sont pas sans rappeler quelques grands classiques de la science-fiction, il y a quelques petites touches de Blade Runner cà et là, mais surtout un trait spielbergien. Plusieurs personnes ont parlé de Rencontre avec le troisième type, mais c'est personnellement le très vieux souvenir d'émerveillement devant E.T. qui m'est revenu en tête. Par ailleurs, la musique a un pouvoir évocateur assez important. Elle emprunte tour à tour les notes légères de Gone Girl et les bourdonnements sourds du film de Ridley Scott mentionné ci-dessus. Le résultat est flottant, presque à la dérive, ce qui sied au ton général de l’œuvre.


En effet, le film demeure mystérieux. Beaucoup d'éléments restent volontairement sans explications, sans que cela nuise à la compréhension pour autant. Le scénario s'éparpille tout en gardant suffisamment d'unité pour être compris dans les grandes lignes. On a l'impression d'assister à quelque chose qui nous dépasse totalement, et cela se marie bien avec la représentation du fantastique. Les pouvoirs d'Alton ne sont pas faits pour être classes ou spectaculaires, ils sont traités de manière très terre-à-terre, comme un problème à résoudre. Ce parti pris original fait de Midnight Special une sorte d'anti film fantastique plutôt bien vu. Après, cela ne l'empêche pas d'avoir une structure classique, avec des articulations parfois très visibles (l'agent fédéral qui entoure deux numéros sur son tableau et hop ça y est, il sait où Alton et son père se dirigent). L'analogie avec Superman/Jésus n'est pas non plus un exemple de finesse, mais cela reste suffisamment secondaire pour ne pas prendre le pas sur le plaisir du visionnage.


Finalement, le scénario est à l'image de la production du film : on ne savait pas où toute cette affaire allait nous emmener, mais on s'est lancé quand même, et finalement le résultat n'est vraiment pas si mal. J'en conclue que Jeff Nichols est à l'aise avec le fantastique, et il peut recommencer quand il veut.

MemoryCard64
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2016

Créée

le 20 mars 2016

Critique lue 310 fois

1 j'aime

MemoryCard64

Écrit par

Critique lue 310 fois

1

D'autres avis sur Midnight Special

Midnight Special
Sergent_Pepper
8

Duplicity lights

Il faut un certain temps pour mettre le doigt sur l’emprise générée par Midnight Special. Parce qu’il est accidenté, parce qu’il n’est pas exempt de défauts, le trajet qu’il propose nous embarque...

le 17 mars 2016

156 j'aime

35

Midnight Special
Star-Lord09
7

ALTON EST LE FILS DE KRYPTON

C'est un critique malheureux qui prend la plume. Malheureux parce que l'orgasme filmique amorcé ne s'est pas produit. Malheureux parce que la promesse de caresser une époque révolue (celle des prods...

le 16 mars 2016

147 j'aime

87

Midnight Special
Behind_the_Mask
8

Shine a light

Midnight Special commence dans le noir. Dans une voiture qui roule de nuit tous phares éteints. Avec, sur la banquette arrière, un enfant qui lit des vieux Action Comics à travers une drôle de paire...

le 23 mars 2016

63 j'aime

14

Du même critique

Les Malheurs de Sophie
MemoryCard64
5

Le plus grand damage control de 2016 ?

Les Malheurs de Sophie fait partie des quelques romans qui m'ont donné le goût de la lecture plus jeune. J'ai donc un attachement tout particulier pour cette histoire et l'attendais au tournant...

le 27 avr. 2016

13 j'aime

2

T'aime
MemoryCard64
1

T'aime T'aime et nanar

"Gontieeeeeeeer ! Hé ! GONTIEEEEEEEEEER ! Gontier c'est à toi qu'je parle ! Comme tes avocats ont décidé que j'pouvais voir ma fille que demain et qu'c'est ce soir... qu'j'ai envie lui dire que je...

le 26 oct. 2016

10 j'aime

4