Que nous a véritablement légué le cinéma hollywoodien des années 80, celui de Spielberg, tant de fois copié, dénaturé, dévitalisé par la l'industrie même qui lui a donné jour ? : l’émerveillement, le cinéma comme acte de foi, comme ultime refuge de l'imaginaire enfantin.
Spielberg n'a pas sortie cela de son chapeau magique. Lui même ne se considérait à l'époque que comme l'héritier d'un cinéma hollywoodien classique dont il cherchait à retrouver la force mystique et transcendante. On parle ici du cinéma Cecil B. DeMille, de Michael Curtiz, de John Ford ou encore de Disney. Spielberg n'a fait que réintégrer cette notion d’émerveillement, de douce naïveté dans un genre que l'on considérait alors comme impur : la science-fiction.
Car avec La rencontre du troisième type (1977) et E.T (1982), tout allait changer. Le génie de Spielberg c'est d'être parvenu à galvaniser toute une génération de spectateurs comme peu l'avait fait avant lui, tout simplement en réactivant quelque chose qui s'était brisé dans les cœurs après des années 1960/70 marquées par le doute.
Au début des années 1980 Spielberg a réactivé la croyance en l'image de cinéma et c'est ce que Nichols tente de faire également, comme il l'avait fait avec Take Shelter il y a déjà 5 ans.


Jeff Nichols n'est pas un réalisateur de blockbuster comme l'était Spielberg, mais tous deux sont des auteurs très attachés à certains thèmes : L'enfance, les relations familiales compliquées, la croyance.
Avec "Midnight Special" le jeune réalisateur fait bien mieux que de simplement citer avec nostalgie Spielberg ou l'esthétique d'un certain cinéma 80's, il se les approprie totalement, les fait rentrer dans son univers tout en conservant cette délicatesse dans la mise en scène, à même de faire surgir le potentiel sublime de l'image de cinéma.
Le film n'est qu'une longue progression vers un final d'émotion pure qui ne fonctionne que si le spectateur s'est chargé tout du long de cette mélancolie, de cette douleur sourde qui jalonne le film.
L'émotion se construit plan par plan, obéit à un certain rythme, une certaine rigueur de mise en scène à laquelle peu de réalisateurs osent vraiment s'atteler. Nichols le fait et ça fonctionne plutôt bien.


Mais les spectateurs de 2016 sont-ils prêts à se prendre au jeu ? A voir. C'est peut être ce genre de film qui trace une ligne assez nette entre certains types de publics, ceux qui refrènent leurs émotions devant l'écran, préférant garder une distance sceptique et ceux qui au contraire la recherche cette "fameuse émotion" qui nous fait oublier notre corps et nous fait plonger dans l'image.
Le cinéma est un acte de croyance, qu'on le veuille ou non. En cela Nichols a parfaitement retenu la leçon.

Clément_El_Vass
8

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Créée

le 17 mars 2016

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