Duplicity lights
Il faut un certain temps pour mettre le doigt sur l’emprise générée par Midnight Special. Parce qu’il est accidenté, parce qu’il n’est pas exempt de défauts, le trajet qu’il propose nous embarque...
le 17 mars 2016
156 j'aime
35
Un immense mystère entoure le nouveau film du jeune prodige Jeff Nichols. Le trailer était prometteur, avec la première incursion du réalisateur dans la science-fiction. C'est aussi la première fois, qu'il s'associe avec un grand studio, en l'occurrence la Warner Bros. Son acteur fétiche, Michael Shannon, l'accompagne dans cette nouvelle aventure. Le long-métrage sera-t'il à la hauteur des attentes où l'auteur va-t'il perdre de son génie au contact d'une major ?
Roy (Michael Shannon) et Lucas (Joel Edgerton) ont kidnappé Alton (Jaeden Lieberher). On va rapidement se poser plusieurs questions : pourquoi ? qui sont-ils ? Qu'à de spécial cet enfant ? Où vont-ils ? Quel est ce ranch ? Pourquoi le FBI et la NSA sont sur leurs traces ? Quels sont leurs liens ?
Une oeuvre envoûtante. Dès le début, Jeff Nichols va nous prendre par la main et nous asseoir auprès de ses héros. On est rapidement en empathie pour ce mystérieux enfant se baladant avec des lunettes de plongée, dormant avec un casque sur les oreilles et lisant des comics. Il semble absent, comme détaché des événements qui se jouent en sa présence. Son calme n'est qu'une apparence, elle contraste avec la nervosité de son père et la peur de sa mère. On vibre avec eux et dès que l'action s'accélère, on est secoué dans tout les sens. C'est bref, mais intense. Mais il y a aussi cette peur qui s'immisce au fil des minutes : la fin sera-t'elle à la hauteur où la promesse ne sera pas tenue ? A la différence de M. Night Shyamalan, Jeff Nichols sait exploiter sa bonne idée jusqu'au clap de fin. On sent aussi l'influence des années 80 dans ses œuvres. On ne peut s'empêcher de penser à Rencontres du troisième type, en se demandant si le personnage de Paul Sevier (Adam Driver), n'est pas un clin d’œil au Claude Lacombe (François Truffaut) de Steven Spielberg. Il y a aussi les similitudes avec Starman de John Carpenter, mais en les citant, ce serait un spoiler. On ne peut qu'apprécier ses références culturelles, avec ses deux grands réalisateurs.
Jeff Nichols aime jouer avec le spectateur. Le réalisateur est aussi un scénariste s'inspirant de sa vie, pour nous conter des histoires où la famille à une place importante. Il va nous plonger au cœur de sa nouvelle oeuvre, sans nous présenter les personnages. Cette manière de procéder oblige le spectateur à s’immerger totalement dans le film, au risque de perdre le fil et de rater des indices. Le puzzle n'est pas complexe, on découvre rapidement les liens entrent les divers protagonistes. Au contraire, le but va mettre plus de temps à se faire connaitre. L'envie de savoir est forte, tant la curiosité est un sentiment qui anime souvent nos esprits. Mais l'essentiel n'est pas vraiment là. La finalité sert à démontrer la puissance du lien qui existe entre un fils et son père. Ce lien filial est plus fort que tout et le père ne va pas à hésiter à le protéger envers et contre tous. Son fils est une partie de lui-même, il s’inquiétera pour lui, jusqu'à la fin de ses jours. Peu importe les mots de son fils, ce sentiment ne peut s'effacer, ils sont liés à jamais.
Des gens ordinaires dans une situation extraordinaire. Jeff Nichols n'oublie pas de nous raconter une histoire. Même s'il continue d'aborder les mêmes thèmes : la famille, l'enfance, la foi et la différence. Il réussit à donner une dimension fantastique à son oeuvre, comme cela fût aussi le cas pour Take Shelter. Il fait cela avec simplicité, en restant ancré dans la réalité. Son film est un vrai plaisir et nous tient en haleine, du début à la fin. Le style est épuré, les dialogues minimalistes et l'action ne dure jamais longtemps. Sa simplicité ne signifie pas qu'il est dans la facilité, mais dans l'efficacité. Il va à contre-courant des blockbusters qui en font toujours des tonnes, pour nous en mettre plein les yeux. Il n'oublie pas de ravir notre regard, mais sollicite aussi notre cerveau. Ses plans sont sublimes, tout comme le visage de ses acteurs (trices). On ressent plusieurs émotions sur celui de Michael Shannon, Joel Edgerton, Kirsten Dunst, Adam Driver et du jeune héros Jaeden Lieberher. On a pas besoin de longs dialogues, ni d'explications pour comprendre les sentiments de chacun. Son cinéma transmet diverses émotions, en un regard, un plan où une phrase.
Jeff Nichols continue de construire une magnifique filmographie. Son talent est immense et il signe avec Midnight Special, son meilleur film. Son association avec Michael Shannon est une des plus fructueuse dans le monde du cinéma. Le casting est prodigieux, à l'image de cette belle fable, qui atteint son but en nous permettant de s'envoler loin de notre quotidien.
Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Top 25 films 2016
Créée
le 17 mars 2016
Critique lue 348 fois
3 j'aime
D'autres avis sur Midnight Special
Il faut un certain temps pour mettre le doigt sur l’emprise générée par Midnight Special. Parce qu’il est accidenté, parce qu’il n’est pas exempt de défauts, le trajet qu’il propose nous embarque...
le 17 mars 2016
156 j'aime
35
C'est un critique malheureux qui prend la plume. Malheureux parce que l'orgasme filmique amorcé ne s'est pas produit. Malheureux parce que la promesse de caresser une époque révolue (celle des prods...
le 16 mars 2016
147 j'aime
87
Midnight Special commence dans le noir. Dans une voiture qui roule de nuit tous phares éteints. Avec, sur la banquette arrière, un enfant qui lit des vieux Action Comics à travers une drôle de paire...
le 23 mars 2016
63 j'aime
14
Du même critique
Ce film me laissait de marbre, puis les récompenses se sont mises à lui tomber dessus, les critiques étaient élogieuses et le genre épouvante, a fini par me convaincre de le placer au sommet des...
Par
le 4 févr. 2015
64 j'aime
7
Depuis la décevante conclusion de la trilogie Cornetto avec Dernier Pub avant la fin du monde, le réalisateur Edgar Wright a fait connaissance avec la machine à broyer hollywoodienne, en quittant...
Par
le 20 juil. 2017
56 j'aime
10
Enfin! Oui, enfin une comédie française drôle et mieux, il n'y a ni Kev Adams, ni Franck Dubosc, ni Max Boublil, ni Dany Boon et autres pseudos comiques qui tuent le cinéma français, car oui il y a...
Par
le 16 avr. 2014
52 j'aime
8