Des fois, l'art c'est chiant même quand c'est bien

Millenium Mambo c'est l'archétype du film que tu peux pas vraiment critiquer sur le fond ou sur la forme. Pourquoi? L'un sert l'autre et inversement. Je sais plus qui disait que le cinéma ça sert à expérimenter une nouvelle forme de temps, c'est exactement ce que fait Hou Hsia-Hsien avec son film. Mais bon, ça à beau être swaggé comme approche, ça n’empêche que des fois on s'emmerde bien comme il faut.

Le temps comme thème fondamental

Millenium Mambo c'est l'histoire d'une meuf bloquée dans une boucle infinie qui la mène toujours au même point: avec son mec qui est "un peu une merde mais franchement y a des jours c'est moins pire". Les deux personnages ne sont pas vraiment intéressants, ils n'ont pas de but ou s'ils en ont un il est occulté par leurs caractères apathiques. On pourrait dire "bon bah voilà c'est des personnages mal construits", mais en fait non. C'est l'inaction de Vicky (la meuf dont je parlais à l'instant) qui justifie tout le parti prit du film et inversement. On suit sa vie pendant un petit moment (bon par contre c'est le bordel entre flashback, re-flashback et flashforward dans un flashback dans un flashback) et on se rend compte assez vite de la magouille de Hou Hsiao-Hsien. Il ne se passe rien, fin si, il se passe des trucs mais toujours les mêmes. Vicky est bloquée, condamnée à revivre encore et encore les mêmes actions, rentrer chez elle, prendre un verre, s'allumer une clope, en avoir marre de son mec, se barrer, revenir, etc. Elle finira pourtant par s'extraire de cette condition (passant de l'inaction à l'action) pour réintégrer le cour normal du temps. L'approche est intéressante car on expérimente une forme de temporalité qu'on ne peut ressentir dans la réalité: l'absence de temps.

Avoir un propos, c'est cool, mais bon limite faire un film regardable ça pourrait être cool aussi

Millenium Mambo c'est le genre de film qui fait bander sur des kilomètres le trentenaire cinéphile un peu hipster. La composition de l'image est magnifique, les lumières dans la boite de nuit sont à tomber, les cadres toujours exploités avec intelligence (par les plans fixes dans l'appartement notamment). Fin bref, Hou Hsiao-Hsien, c'est un bon. Tu rajoutes à ça un propos un peu original et une mise en scène qui sert le propos, et hop, emballé c'est pesé, t'a un film d'auteur que tu peux balancer à Cannes sans trop te poser de question, les gars, ils vont kiffer. Et ouai, c'est de l'art mon gars. Mais des fois, l'art, c'est chiant. On se retrouve dans le cas typique du film plus intéressant à analyser qu'à regarder, et ça c'est un problème, pour moi du moins. Pour ce qui est du propos (bon après je suis peut être une courge galactique), il a fallu que je fasse quelques recherches ensuite pour comprendre ce que je venais de voir. Après coup je trouve donc le film plus intéressant qu'au visionnage. Durant celui-ci je me suis rendu compte que c'était beau, qu'il y avait cette notion de cyclisme, etc, mais au fond je me suis surtout fait chier bien comme il faut. C'est long, c'est répétitif, même les personnages ont l'air de se faire chier, et le pire c'est qu'on peut rien dire parce que ça sert parfaitement le propos du film, merde alors.

Au final Millenium Mambo c'est un questionnement sur le temps, sur la vie, sur le cinéma. C'est un incontournable si vous aimez les films qui font réfléchir sur la vie, l'univers et le reste. Mais bordel qu'est ce qu'on s'emmerde, il ne se passe rien, on a envie de cracher à la gueule des personnages tout le long du film et à la fin on se dit simplement "attends?! C'est comme ça que ça se finit?! Tu te foutrais pas un peu de mal gueule Hou Hsiao-Hsien?!".