Minamata a plusieurs mérites, dont le premier est de rappeler l’importance de la photographie pour extraire une injustice de son pays et le diffuser au monde entier, dans une époque qui ne connaît pas encore les technologies numériques contemporaines. Ladite photographie relève ici non du voyeurisme mais d’un art revendiqué comme empathique, seul à même de connecter des individus différents ayant pourtant en commun leur humanité. Le film insiste sur le processus de construction d’un point de vue, antérieur au développement de la photographie, et investit un scandale industriel par le biais de l’intime, du négatif qu’il faut exploiter selon des conditions particulières pour donner vie à une image. La commande que doit exécuter Smith mute en mission qu’il mène contre vents et marées, bravant les autorités japonaises au péril de sa santé.
Nous regretterons alors que l’écriture des personnages tombe à ce point dans le cliché qu’il empêche toute opacité intérieure : le photographe interprété par Johnny Depp est réduit à un alcoolisme qui semble définir les rôles de l’acteur depuis peu – pensons à The Professor (2019) de Wayne Roberts ou au dernier volet des aventures de Jack Sparrow. Sa relation avec Aileen s’avère prévisible et condamne la femme à une caractérisation facile, presque anachronique, aimantée par la vie conjugale qu’elle partagera avec Smith suite à cette affaire. La réalisation d’Andrew Levitas s’enivre d’une esthétisation impersonnelle qui échoue à épouser la simplicité de l’engagement du photographe dans une cause qui le dépasse.
En résulte un long métrage mineur, instructif et correctement interprété, mais qui n’atteint jamais la force et la rigueur du récent Dark Waters (2019) signé Todd Haynes.