Les Mandibules du Bout du Monde, alors qu'il teasait dans sa bande annonce une délocalisation quasi intégrale, s'ouvre en terrain connu. Tout près de la colonie de fourmis qui en profitait pour remaker la bataille du gouffre de Helm. En plein hiver. Il reprend même une des scènes fétiches de la série, cette course poursuite vrombissante se terminant dans une toile d'araignée.
Le spectateur se dit que c'est sympa, mais que cela sent un peu le réchauffé, même si cela marche encore une fois. Jusqu'à ce que l'intrigue s'invite en pleine ville, dans des airs de Shaun le Mouton : Le Film. Et c'est ce qui désarçonne tout d'abord le fan de la série : réduit à l'état d'ombre fugace, ou de présence suggérée, l'homme prend, dans Minuscule 2, une part active dans la narration, activant certains de ses plus importants ressorts.
On a peur du changement de braquet. Sauf que c'est mal connaître les chefs d'orchestre de l'aventure, Hélène Giraud et Thomas Szabo, dont la volonté est, clairement, d'amener Minuscule au level supérieur, de renouveler son univers. La promesse est tenue dès l'apparition de ce galion, synonyme de péripéties maritimes épiques. Un bateau qui rappelle le meilleur de Pixar, Là-Haut, plus précisément, et dont on se dit qu'il n'aurait pas dépareillé chez Terry Gilliam tendance Baron de Münchausen. Tandis que son capitaine, lui, ressemblerait presque au bourru Quint.
Et à la seconde où la petite communauté pose pied sur les plages de l'île-papillon, la mission s'accomplit : décors superbes, faune et flore inédite, nouvelles situations : Minuscule 2 : Les Mandibules du Bout du Monde a tout bon. Les aventures sont rocambolesques et scotchantes, aidées par une technique bien plus dynamique qu'il y a quatre ans. La drôlerie discrète, les notes de poésie et le charme des arrières-plans font presque toujours mouche. Et le film de se teinter, le temps d'une séquence lunaire, d'une touche de spiritualité. Ou de science fiction / fantastique, quand notre coccinelle se pose en milieu ouateux.
Ces Mandibules du Bout du Monde sont donc hautement conseillées afin de continuer à garder la foi en une production française futée, intelligente et pleine de coeur. Alors même que le spectateur, lui, fait fi, pendant la séance, de ces considérations, tant l'aventure déployée est riche, jolie et intéressante. Tant les clins d'oeil, les références ou les changement d'atmosphère s'agencent sans jamais vampiriser le récit pas super original mais diablement bien conduit et enlevé.
Tout en faisant réfléchir, en creux, sur la place de l'humain dans cet univers. Car si les enjeux, naguère, étaient à hauteur de fourmi, convergeant autour d'une trace humaine prenant la forme d'une boîte de sucre, Les Mandibules du Bout du Monde, aujourd'hui, ne cache plus ses silhouettes et les rend immédiatement identifiables, tout en portant l'accent sur la menace qu'elles constituent ou le poids de leur main dans la destruction d'un environnement fragile.
Le tout dans un film où le voyage s'envisage avant tout comme un moyen de grandir, de lâcher la bride et de se définir en tant que parent. Véritable coeur du récit que l'on n'attendait pas de la part de son classieux tandem. C'est finalement le coeur qui fait battre Minuscule 2 : un coeur humble, malicieux, adoptant un regard bienveillant sur son univers et les personnages qui le peuplent.
Que le monde est petit...
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