Rester vertical servait d'avertissement : le cinéma de Guiraudie pousse le spectateur à bout, jusqu’à la répulsion et la nausée. À la fois plein de lacunes et d’invraisemblances et bien écrit, il étonne autant qu’il dégoûte.
Ainsi est Miséricorde, amalgame bizarre de Crime et châtiment et d’un vague et troublant fantasme : d’un côté une solide réflexion morale sur le crime, la mort, la punition, la rédemption, de l’autre une folle pulsion sexuelle embrassant ce qui il y a de plus libre mais aussi remuant ce qui a de plus répugnant : les jeux de mains à double sens avec le copain d’enfance, le rêve secret de baiser la mère de son pote, le fétichisme des vêtements mais aussi, en plus dégueulasse, les sous-vêtements sales de l’homme ogre et rustre, la relation secrète avec l’homme mort qui fut son tuteur (maître d’apprentissage potentiellement pédophile), le curé qui reluque ses paroissiens, la tentation nécrophile. À côté de cette accumulation nauséabonde qui permet au passage à Guiraudie de ratisser large (et de faire clairement du prosélytisme et de prêcher pour sa paroisse), le crime semble secondaire, enfantin et innocent – idée que renforce le curé, dont l’omniprésence et l’omniscience agissent comme la main de Dieu sur l’action, et qui en dédramatise la gravité à travers le Pardon.
Un film volontairement pesant et sadiquement dérangeant.