S'installer devant un Mission : Impossible, c'est être sûr de certaines choses. Notamment, celle de voir Tom Cruise en roi des espions au meilleur de sa forme, de presque tous les plans, entouré de sa famille, développée au fil des épisodes, Ving Rhames et Simon Pegg, ainsi que le nouveau venu tout relatif Jeremy Renner.
C'est être sûr de la qualité du film qui sera proposé, seule franchise à laquelle Tom Cruise est attachée, d'autant plus fort que chaque épisode a été réalisé par un metteur en scène différent, tant dans sa vision que dans son exécution. Si Christopher McQuarrie s'empare du matériau avec gourmandise et se fond dans la dynastie, il laisse une empreinte originale sur la saga. Car Rogue Nation semble renouer avec l'essence originale de la série télé Gellerienne, tandis que le réalisateur émule le sentiment de paranoïa des films d'espionnage des années 70, conférant un charme presque rétro à l'ensemble sous son masque, sous ses allures de blockbuster des années 2010 aux couleurs chaudes et varié dans ses environnements. L'étape viennoise n'y est pas pour rien, dans son opéra, avec sa scène d'infiltration en aveugle et son Turandot monté en parallèle.
Le nom d'Ilsa Faust concourt aussi à cette réminiscence, tout comme son rôle ambigu et ses attitudes. Parfois alliée d'Ethan Hunt, souvent antagoniste, elle se joue des autres au moins tout autant que l'on se joue d'elle. Elle joue elle-même d'une scène à l'autre en faisant tomber les masques qu'elle coiffe, tout en en attrapant d'autres au vol, qui seront bientôt recouverts par ceux qu'on lui impose de porter. Nul besoin ainsi d'avoir recours au subterfuge éculé du masque en latex, pourtant gimmick systématique de la série, que l'on verra le temps d'une séquence d'élaboration d'un plan. Ilsa est le personnage pivot du récit, qui en cristallise toutes les thématiques charriées par le seul "Rogue" du titre. Elle est l'image de la manipulation et des fils d'une marionnette qui s'emmêlent, faisant des hommes et des femmes au service du renseignement des pions que les nations poussent de leur bras armé, toujours masqué(e)s, sur un échiquier du monde et des menaces de moins en moins identifiable.
Cette vision très 70's est cependant contrabalancée par le spectacle, dont McQuarrie n'est pas avare, mais qu'il dose juste ce qu'il faut. Si une scène de combat à mains nues n'est pas super lisible, la poursuite dans les rues de Casablanca, celle à moto, l'infiltration dans un site sécurisé ou encore celle du l'opéra sont efficaces et soutenues, assez originales sans en mettre plein la vue, à l'image de ce Rogue Nation plaisant, divertissant et ultra efficace. Comme le climax de l'oeuvre qui fera tomber les masques.
Behind_the_Mask, ou peut être quelqu'un qui se cache derrière, allez savoir...