Drôle de film, Missouri Breaks.
On est pas vraiment fan de western, on y va un peu à reculons mais bon c'est Arthur Penn... y'a Marlon et Jack aussi, on sait à peu près où on met les pieds.
Et rien à dire, le travail est bien fait, tout y est.
Nouvel Hollywood à plein régime, héros déboîté ok, critique sociale ok, violence servie crue double ok.
Un modèle du genre, avec des bouffées d'Easy Rider et une photo aussi chaude qu'un 15 août à Woodstock (cf l'affiche, allergiques au jaune passez votre chemin).
Voilà.
Voilà mais non rien en fait, car il y a Marlon, et là... Les miraculeux ennuis commencent.
On ne saura probablement jamais qui de lui ou de Penn a véritablement dessiné les contours de ce fou de Lee Clayton (Brando dans le film), mais on s'en fiche un peu.
"Régulateur" de son état, et payé par un riche propriétaire terrien pour faire le ménage, Clayton c'est le type qui vous descend tranquillement un malfrat à 500m tout en susurrant des chansons d'amour à son cheval.
Un gars un peu spécial, qui pique des glaçons dans les cercueils pour soigner ses rages de dents, et aime bien se déguiser en grand-mère pour accomplir ses basses oeuvres.
Un genre de Terminator qui serait abonné à Vogue.
Comment Brando arrive à faire tenir debout cet excentrique pervers, dément, ridicule, grandiose, froid comme un serpent et délicat comme une fillette, c'est un mystère. Mais il y arrive.
Chacune de ses mimiques, chacun de ses défauts d'élocution est si outré et pourtant si étrangement juste que la notion même de surjeu en est tout à coup pulvérisée.
Sa composition explose le film, plutôt classique pour l'époque, et le porte beaucoup plus haut et plus loin que prévu.
Echec commercial et critique à sa sortie, un peu passé à la trappe et injustement sous estimé, The Missouri Breaks est un film définitivement atypique.
Eminemment intéressant par la manière dont il confronte, juxtapose et imbrique une démarche esthétique et intellectuelle contextualisée à ce qui tient du génie purement individuel.