Missouri Breaks appartient comme John McCabe d'Altman, Soldat bleu de Ralph Nelson, Pat Garrett et Billy le Kid de Peckinpah, ou Little Big Man du même Arthur Penn, à ce groupe de nouveaux westerns des années 70 qui donnaient du vieux Far West une image beaucoup plus réaliste, voire crue, et beaucoup moins romanesque, moins légendaire ou moins fantasmée. Arthur Penn, loin des conventions du genre, brosse le tableau d'une société dominée par les intérêts particuliers, à une époque (en 1880) où l'Ouest subit la grande mutation du mécanisme et du modernisme. Autant dire que l'esprit pionnier fordien et le lyrisme hawksien font place ici à un univers sans honneur.
Vu comme ça, le film, comparé aux westerns hollywoodiens à l'ancienne, peut déplaire aux puristes et n'intéressera en revanche que ceux qui aiment la relecture du Far West. De mon côté, ce n'est pas un de mes westerns préférés, loin de là, mais j'y trouve des qualités, et il faut en ces années 70, évoluer et voir le western sous un oeil différent.
D'autant plus que le grand atout de Missouri Breaks, c'est non seulement cet aspect désenchanté qui tourne la mythologie westernienne en dérision en n'hésitant pas à frôler la caricature, mais surtout c'est la confrontation des 2 monstres sacrés que sont Brando et Nicholson. Celui-ci est un peu moins cabotin que d'habitude, alors que Brando se livre à un ahurissant numéro d'acteur, à la limite de l'autoparodie, notamment quand il se déguise en vieille dame. Leurs prestations pimentent ce western à la folie baroque assez curieuse.