Sans aucun doute, Mistress America est bien un film de Noah Baumbach. C'est même l'archétype du film "à la Baumbach" : New-York, des étudiants, des gens riches et moins riches, des lofts, des filles paumées et des garçons perdus, tout est là, simultanément réjouissant et irritant.
The Squid and The Whale ou Frances Ha avaient démontré la sensibilité de Baumbach à l'égard des teens americains - catégorie de plus à plus extensible à mesure que ses maux se particularisent - cette appétence (comme Araki par exemple) à s'emparer du mouvement et des atermoiements de la jeunesse dans son processus créatif, qui ressemblait jusque-là à une joyeuse course en avant, sortie de l'enfance en forme de jeu d'obstacles ludique.


C'était d'ailleurs la promesse d'un incipit charmeur à souhait, illuminé par la découverte de la boudeuse Lola Kirke, sorte d'aberration frondeuse qui fait frémir la caméra de Baumbach, comme Gerwig auparavant dans Greenberg. A force de parler du loup, ça ne manque pas, apparaît soudain le monstre, la figure-étalon, tellement imposante dans le cadre que plus rien ne s'épanouit à l'ombre de sa silhouette devenue caricaturesque. Le mano à mano, en forme de dialogues désynchronisés, enlaidit Gerwig comme il efface Kirke, ne profitant à aucune des deux et jouant contre le film au point d'agacer autant, sinon plus que le personnage de Brooke. A partir de là, Baumbach est dans sa zone de confort et cesse de surprendre : champs/contrechamps fainéants, déroulement et enjeux calqués sur le système (déjà peu inspiré) attraction/répulsion générationnelle de While We're Young, Kirke/Gerwig en verso féminin de Driver/Stiler, la performance agitée de l'aînée reléguant la cadette, pourtant centre gravitationnel, au simple rang d'objet satellitaire.


Arrivent alors les regrets. S'il avait sû s'obséder un tant soit peu pour sa véritable héroïne, explorer davantage le club Mobiüs, les tartes à la crème, les triangles amoureux, les cartables jetés dans l'Hudson River, ou encore la passion bizarre entre deux trajectoires jumelles, sans céder à la satire et au rire facile, Mistress America auraît dévoilé le meilleur de Noah Baumach au lieu de le pasticher sur un mode mineur.


Quant au réalisateur, on attend avec impatience, outre son documentaire sur De Palma, qu'il prenne davantage de risques : en cédant totalement aux teenagers et en refusant de grandir (John Waters et son Cry Baby), en explorant ses affects à la première personne (Nanni Moretti en modèle) ou bien en quittant l'écrin new-yorkais pour explorer de nouvelles contrées (The Lost City Of Z, James Gray)...

Corentin_D
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le 11 janv. 2016

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C DD

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