On ne peut pas dire que Gundam reste dans sa zone de confort avec cette nouvelle proposition de long métrage : une prise d'otages sanglante, une ambiance d'espionnage avec femme fatale et double identité en prime, une mise en retrait évidente des robots géants durant la majorité du récit et une action qui se déroule intégralement sur notre pauvre planète bleue menacée en dédaignant pour l'heure les péripéties dans l'espace; clairement, la franchise essaye de se réinventer et elle y parvient plutôt bien : l'esthétique est soignée et tranche radicalement avec les précédents films du Siècle Universel (même si elle fourmille parfois un peu trop de détails qui dispersent l'attention du spectateur, comme pas mal d'animés de la vague Violet Evergarden) et la mise en scène est très élégante autant pour dépeindre la confusion émotionnelle de son protagoniste taiseux que susciter le doute dans l'esprit du public sur les véritables motivations de chacun.
Personnage sous-exploité du film Char Contre Attaque, Hathaway Noa a ici droit à un bel enrichissement dans la continuité de ses précédentes mésaventures; le point de vue a beau être radicalement différent et la patte visuelle très éloignée des productions animées des années 80, on parvient facilement à croire qu'il s'agit là du prolongement des séries originelles avec des thématiques pas déconnantes avec la volonté de Char de contraindre l'humanité à accepter son évolution dans l'espace au lieu de s'attacher à une terre moribonde. Deux ombres au tableau viennent malheureusement ternir cette belle proposition créative :
-Le CGI demeure visiblement la voie choisie par Sunrise pour dépeindre désormais ces robots emblématiques; c'est bien regrettable car leur allure disgracieuse tranche d'autant plus avec la qualité des décors et personnages environnants et même si l'action se veut parfois virtuose avec des cadres audacieux depuis les cockpits, les affrontements manquent considérablement de lisibilité à tel point qu'on ne sait même plus vraiment qui est en train de frapper qui.
-Ce film demeure le premier volet d'une trilogie en devenir mais il ne propose malheureusement pas d'intrigue complète pour autant, donnant l'impression de couper son récit au premier tiers alors que les enjeux commencent à être bien mieux définis pour les protagonistes. On fait confiance au studio pour nous pondre en conséquence une future série télé qui proposera, sans grande peine, un nouveau montage de ces trois films en récit continu, peut être finalement préférable pour le visionnage.
Malgré tout, pas de quoi cracher dans la soupe : Gundam à échelle humaine, ça a également un intérêt et à ce titre, la scène la plus marquante de ce long métrage demeurera certainement un affrontement entre quelques Mobile Suit ressenti à l'échelle des civils, impuissants devant les dommages collatéraux provoqués par la collision entre ces colosses d'acier. Cette première partie semble d'ailleurs clairement assumer le parti d'embrasser le regard des terroristes prêts à se salir les mains mais le dénouement semble davantage lorgner vers la camaraderie d'une bande de rebelles prêts à lutter contre l'oppresseur; bref espérons que les futures suites auront l'audace d'assumer la dureté revendiquée par son personnage principal car c'est bien sous cet angle de vue que Hathaway pourra forger sa propre singularité dans le vaste héritage de l'univers Gundam.