Mommy {Par maccafan21 & Avec Spoilers}

Déjà, je préfère prévenir de suite, les personnes allergiques aux superlatifs ou qui en ont marre que l'on crie au génie concernant Xavier Dolan, cette critique n'est pas faite pour vous ^_^.
Il est vrai que je ne connais pas très bien la carrière de ce réalisateur [carrière déjà bien fournie, avec 5 films au compteur à seulement 25 ans!] puisque Mommy est le premier de ses films que je vois. Mais honnêtement, sans pouvoir faire un constat d'ensemble, ce que j'ai vu ici est largement suffisant pour dire que ce jeune homme a du talent, et pas qu'un peu!


Synopsis : Une veuve mono-parentale hérite de la garde de son fils, un adolescent TDAH impulsif et violent. Au cœur de leurs emportements et difficultés, ils tentent de joindre les deux bouts, notamment grâce à l’aide inattendue de l’énigmatique voisine d’en face, Kyla. Tous les trois, ils retrouvent une forme d’équilibre et, bientôt, d’espoir.


La mère, Diane "Die" Després, est une véritable battante, qui sous ses airs d'ado (que se soit dans sa manière de s'habiller, de parler ou encore d'aborder certaines situations) est en réalité très adulte quand il est question de son fils et de gérer des situations difficiles. Incarnation parfaite du courage, cette femme est de fait un authentique hommage à la mère, et j'ai envie de dire hommage bien mérité!
Le fiston, Steve Després, est un adolescent souffrant de trouble de déficit de l'attention avec hyperactivité. Depuis le décès de son père, il parcourt les centres spécialisés pour jeunes, mais fini toujours par se faire renvoyer du fait de ses emportements. Cependant Steve a une seconde facette, celle d'un garçon à la fois touchant, sensible et très attaché à sa mère.
Quant à Kyla, la voisine, il s'agit d'une enseignante ayant vécu un mystérieux traumatisme l'ayant rendu bègue, et qui l'a contrainte à prendre un congé sabbatique. Fragile, en difficulté avec sa famille, elle retrouve néanmoins espoir en rencontrant Diane et Steve. Ses tics s'estompent en leur présence, et sa timidité s'éloigne.


Ces personnages sont interprétés respectivement par Anne Dorval (:inférieur à trois:), Antoine-Olivier Pilon et Suzanne Clément, qui tout trois nous livrent ici une prestation d'une justesse tout simplement incroyable et inégalable. Et pourtant, on ne peut pas dire que se soient les rôles les plus simples à jouer tant la gamme d'émotion est large. Le film traite de sujets graves (la maladie mentale, les relations mère-fils, le placement en institution, ...), tout en étant restant plein d'espoir sur les valeurs d'amitié, d'amour et de liberté.


La production permet d'ailleurs d'exacerber ces sentiments et ce jeu d'acteur, notamment par le format qu'a décidé d'adopter le réalisateur, le format 1:1. Ce format carré, quasiment jamais utilisé au cinéma, est loin de n'être qu'un exercice de style comme le fond parfois remarquer les détracteurs de Xavier Dolan. Au contraire, si le film est aussi poignant, aussi bouleversant, c'est probablement en grande partie grâce à ce format qui permet de se focaliser totalement sur les personnages en excluant tous les éléments superflus qui se trouvent autour d'eux. Le jeu des acteurs prend ainsi une nouvelle dimension!
De plus, Dolan prouve que ce format n'est pas qu'une simple contrainte pour tout ce qui est mise en scène, et qu'au contraire il ouvre là aussi de nouvelles portes. Les plans sont tous plus inspirés les uns que les autres : mouvements de caméra, ralentis, flous, filtres, usage de très gros plans, etc. tout est ici parfaitement maitrisé... Ce quadrilatère dans lequel les personnages sont comme emprisonnés, s'étendra même à plusieurs reprises dans le film sur la largeur traditionnelle de l'écran, lors de scène de bonheur et/ou de réussite, permettant de marquer leurs retrouvailles avec la liberté. Notons d'ailleurs que l'on a déjà les prémices de cette extension de l'espace avec le dézoom final de la scène de danse dans la cuisine.


Ce format carré est aussi celui des pochettes d'albums, ce qui n'est pas totalement anecdotique tant l'univers musical est l'un des points centraux du film.
En effet, la bande originale de Mommy, composé en grande partie de titre populaire de la fin des années 90, est essentiellement intradiégétique. Elle appartient aux personnages mêmes puisqu'elle correspond, par exemple, à la compil 'Die+Steve Mix 4ever' laissée à la famille Després, par le père avant son décès. On y trouve de tous les genres musicaux et en plus on peut souvent percevoir une réelle corrélation entre les paroles et l'histoire (Wonderwall d'Oasis, Vivo Per Lei d'Andrea Bocelli, Born To Die de Lana Del Rey, ...).
C'est une évidence que je repenserai automatiquement à ce film dès que j'entendrai certains de ces titres, et en particulier la chanson On Ne Change Pas de Céline Dion. Pour cause, la scène sur laquelle on entend cette dernière est tout simplement l'une des plus belles de l'histoire du cinéma à mes yeux [et ceux-ci savent de quoi ils parlent étant donnée les larmes qu'ils ont vu couler xD]. Un moment de grâce comme vous aurez l'occasion d'en découvrir tout au long du film!


Ces musiques, mais aussi dialogues et bruitages, sont qui plus est amplifié par un montage et un mixage sonore au top. Voici deux exemples simples parmi tant d'autres : pour le montage, les fans d'Oasis apprécieront le toussotement de Steve précédant la chanson Wonderwall puisque celui-ci fait réellement parti de la musique, et permet une transition parfaite ; et pour le mixage, l'étouffement partiel de la chanson d'Eiffel 65 quand Kyla perd ses nerfs sur Steve est une pure merveille.


Au niveau vocale, le film est en version québécoise sous-titrée (en joual pour être plus précis, un dialecte argotique québécois) et là encore c'est un régale. Cet accent très marqué et les expressions qui vont avec donne un vrai charme au film, d'autant plus que les dialogues sont savoureux, à la fois très drôles, vulgaires et réfléchis.


Bref. Un chef d'œuvre, un vrai! Mommy, tout au long de ses 2h14, ne nous laisse aucun moment de répit. On passe tantôt par le rire, le bonheur, l'indignation, la tristesse, et ce jusqu'au final tout aussi exceptionnel que le reste du film. Donc, si vous aimez un tant soit peu le cinéma, vous savez ce qui vous reste à faire...

maccafan21
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le 8 juin 2019

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