Le poème des corps et des cœurs.
Anne Dorval je t'aime.
Suzanne Clément je t'aime.
Antoine-Olivier Pilon je t'aime.
J'ai toujours eu une certaine affection pour le cinéma de Dolan. Depuis "J'ai tué ma mère" il a été ma révélation. Mais bizarrement, le film le plus tapageur, je n'avais pas envie de le voir. Par un heureux hasard, une route me mena vers un cinéma, je vis "Mommy" qui passait dans une demi-heure, il fallait tuer le temps, rien d'urgent à faire, c'est parti pour 2 heures et 18 minutes assise dans un siège confortable.
Je ne connaissais rien des enfants TDAH. Seulement un témoignage de Valérie Alonso. Rien, quoi. Alors voilà, la machine infernale démarre, les premières images, les suivantes, les flous exagérés et pourtant si poétiques, pas lourds et dérangeants. Les jeux avec les couleurs sacrément bien agencées. L'accent québécois qui a, dans le cinéma de Dolan, quelque chose d'étrangement plaisant. Les ralentis... Grandioses tout simplement.
La violence, la douceur, les émotions, le flot de paroles, le silence, la musique, le regard, les détails ! Il y a tout cela et plus encore, j'oublie certainement des choses qui, sur le moment, m'apparurent évidentes et époustouflantes. La place de la musique chez Dolan est particulière, comme si elle était un personnage à part entière. Comment cela Céline Dion vous insupporte ? Vous n'avez pas vu "Mommy" c'est pour cela ! Je vous jure que vous arriverez enfin à l'apprécier !
La caméra est parfaite dans les fondus, dans les flous, dans les gros plans, très gros plans. Il y a une âme spontanée et déterminée qui fait vibrer le spectateur. Autant la forme que le fond est bon.
Je ne vais rien dire sur l'histoire, je ne voudrais pas vous la dévoiler. Mais il est important de souligner que, même si vous ne vous sentez pas concerné par cette histoire et qu'à cause de cela vous décidez de ne pas voir ce film, vous commettez une grave erreur.
Je me sentais étrangère à tout dans ce récit jusqu'à ce que Dolan me prenne par la main et qu'ensemble, nous y allions. Dolan met la poésie en image, c'est remarquable.
"Mommy" est dense, "Mommy" est danse.
"Mommy" est une respiration de vie qui ne cherche pas à donner des explications farfelues sur telle ou telle subjectivité, sur le comportement de ses personnages : "Mommy" n'est pas une analyse psychologique, c'est une vol en surface des personnages et en même temps une aventure vers les profondeurs de leur vie, de leurs émotions et de leurs démons. On oublie que c'est un film, on vit et notre cœur bat à l'unisson avec celui des personnages, nous nous émerveillons, nous pleurons, rien d'aussi franc depuis très longtemps. Voici une oeuvre bouleversante.
Couleurs et sons confondus, l'intempestive échelle de la vie, courbée, oblique, sournoise.
Merde, c'était beau.
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