François Damiens revient à ses premiers amours pour son premier passage derrière la caméra... C'est pas de l'Orval mais c'est une bonne pils !



Première incursion d’anciennement celui que l’on surnommait François L’embrouille, dans le domaine de la réalisation ; François Damiens décide de porter à l’écran cette histoire d’un loser magnifique, en la personne de Dany Versavel qui s’évade de prison afin d’aller retrouver son fils et de rattraper toutes ces années perdues derrière les barreaux.


Jusque-là, le postulat de départ n’a rien de très innovant, ni de très excitant. Ce qui l’est, en revanche, c’est le processus de réalisation et de narration. La quasi-totalité des séquences seront tournées en caméras cachées et l’essentiel du casting sera des gens piégés à leur insu. Connaissant le passif plutôt furibond du premier intéressé en la matière, cela allait de soi que le projet prenait une direction bien plus aguicheuse et alléchante.


La force de « Mon Ket » apparait à l’écran dès les premières secondes, et il était fort à parier que ce serait le cas, c’est François Damiens lui-même, ou plutôt Dany (ou Le Dany), ce personnage de « baraki » que le belge a si bien incarné à l’époque de ses premières caméras cachées et dont il connait les moindres rouages et traits de personnalités. On reconnait instantanément sa posture, son accent (on se demande même comment il a pu encore berner des personnes au vue de sa popularité). Damiens est complètement habité par son personnage dont la crédibilité est renforcée plus encore par un assemblage de prothèses et un maquillage bluffant qui demandait plusieurs heures de confection.


La deuxième force, c’est évidemment ce jeu du chat et de la souri entre le piégeur et le piégé. Ce mélange si savoureux entre un sentiment d’embarras qui se fait ressentir à l’égard des piégés et d’amusement qui découle de situations aussi absurdes que drôles. A cet égard, il faut tirer son chapeau au comédien belge qui n’a rien perdu de sa verve et de sa capacité d’improvisation, tour à tour interpellant, intimidant et embarrassant ses « victimes ». Victimes, dont certaines, s’en sortent réellement avec les honneurs, offrant une opposition de taille face à leur « bourreau » (on pense à la réaction de cette vieille femme dans l’échoppe qui hallucine face à Damiens qui incite son fils à fumer ou encore à cette artiste que ce même Damiens tente de séduire).


Le problème est qu’une fois ces deux points exposés, et bien il ne reste plus grand chose à dire, tant François Damiens se focalise sur l’iconisation de son personnage et sur les séquences de caméra caché. Il en oublie même sa relation avec son fils (alors qu'elle aurait dû être au centre de l'intrigue) qui est, au pire, inexistante, au mieux, sous-exploitée.


Comme il le déclare dans bon nombre de ses interviews, il aime profondément le gens et ça se ressent implicitement dans son film. Sa façon de les manipuler, de les provoquer ou de leur parler tout simplement. Il reste constamment celui qui se ridiculise. Il y’a même une volonté de pousser les piéger à le ridiculiser encore plus qu’il ne l’est déjà. Il y’a de la bienveillance et de la tendresse dans son regard de réalisateur.


Pour ce qui est de raconter une histoire et de construire une intrigue, on trouve incontestablement une limite et le film devient alors bien moins passionnant.


Damiens tente également d’esthétiser ses plans à l’aide de légers travellings ou de zooms optiques, mais ce n’est pas très intéressant et assez vain dans son élaboration.


Certains sketchs auraient aussi mérité d’être peut-être légèrement raccourcis (comme ce dîner avec les beaux-parents qui n’en finit pas). Malgré une bonne gestion du rythme dans l’ensemble, on a l’impression, parfois, que Damiens étire ses séquences, soit pour intensifier un malaise déjà bien présent (et là on pense instantanément à l’anniversaire du fils, Sullivan) et qui ne nécessite pas d’en rajouter, soit pour allonger son film afin qu’il soit assez long.


Nonobstant, « Mon Ket » reste une expérience très agréable, une bonne comédie populaire qui réussit à mêler différents styles d’humour, passant du surréalisme bien belge au potache pour terminer dans la bouffonnerie made in L’embrouille.

Jogapaka
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le 11 juin 2018

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