Mon légion: un sujet fort pour un film faible

‘Mon légionnaire’ raconte l’histoire de deux membres de la légion étrangère en mission au Mali et celle de leur compagne respective. La difficulté et dangerosité de la mission d’un côté, la difficulté et la solitude de la vie sans eux de l’autre. Un sujet fort pour un traitement convenu.

Car pendant tout le visionnage de ‘Mon Légionnaire’, court un sentiment de déjà-vu. Encore un film sur un corps de métier difficile et le parallèle entre vie professionnelle et vie privée. Maïwenn l’avait fait avec ‘Polisse’ il y a dix ans et avec plus de succès. Car en plus d’être déjà vu, cela n’est pas très réussi ici.

La première partie consiste principalement en un aller-retour entre le Mali où a lieu la mission et la Corse où vivent familles et épouses. Le montage alternatif entre les deux lieux est assez raté. Car les légionnaires et la mission donnent lieu à des scènes fortes où transparaissent le danger, l’anxiété mais aussi la rigueur de l’armée et l’autorité militaire. En revanche, pour évoquer la vie des compagnes, se succèdent des scènes plates, sans force et sans intérêt. Tout le film repose sur le parallélisme entre vie des soldats sur le terrain et celle des femmes en Corse et sur l’opposition entre les deux couples. A la fraternité des soldats assez bien montrée, la réalisatrice Rachel Lang joint la solidarité des épouses. Au couple aisé (elle avocate, lui lieutenant et responsable du groupe de légionnaire), elle oppose un couple ukrainien, parlant mal français (elle qui tente de s’intégrer et qui est la baby-sitter de l’enfant du premier couple, lui qui est le suborné du lieutenant). C’est donc un film d’opposition sociale, professionnelle. Les riches/les pauvres, les français/les étrangers, les employés/les employeurs, ceux qui dirigent/ceux qui obéissent. C’est franchement simple et le sujet aurait mérité d’être pensé autrement, avec moins de facilité et sans binarité.
Les personnages sont inégalement dessinés. Le lieutenant est interprété avec sobriété par Louis Garrel. C’est un acteur de grand talent et tient ici un rôle très physique, ce qu’il n’avait pas vraiment fait jusque-là. En revanche, le personnage de son épouse est mal écrit. Camille Cottin est une bonne comédienne mais elle n’a ici rien à jouer. Son personnage n’est source que de peu d’enjeu si ce n’est ‘Est-ce que je suis capable de continuer à vivre avec toi ?’. Dans l’autre couple, c’est le rôle du légionnaire qui est sacrifié. Il n’a peu d’intérêt. Sa femme est en revanche un vrai rôle. Elle le rejoint par amour. Elle parle mal le français, se sent seule, souhaite s’intégrer et voudrait un enfant.

Le film est donc en demi-teinte, à moitié raté ou à moitié réussi, selon son point de vue. Car il y a assurément des scènes réussies. Je pense à une scène au restaurant où le lieutenant explique son travail à des amis qui ne comprennent pas sa mission et se font moralisateurs. Mais le film laisse un goût amer en bouche car comme de nombreux films français récents, il donne l’impression d’être inachevé ou mal pensé. Rachel Lang a écrit seule son film. Un coscénariste aurait été nécessaire pour muscler l’intrigue et mieux dessiner les personnages.