Voici le portrait d'un médecin de campagne libertin et bon vivant sous le règne de Louis XV, qui exerce bien son métier mais qui n'oublie pas de trousser les filles. C'est un hymne à la vie épicurienne d'après le roman satirique de Claude Tillier publié en 1843, livre qui ne figurera pendant très longtemps dans aucune collection de poche, car le héros Benjamin Rathery est un frondeur, paillard, aimant les bonnes bouteilles et refusant de payer ses dettes ; en plus, il ridiculise les hobereaux bourguignons de la région de Clamecy.
J'ignore si le film fut tourné en Bourgogne, en tout cas, il restitue parfaitement cet esprit de libertinage et de noblesse de campagne encore craint par les villageois, même si cette noblesse est traitée sur un mode ironique. Molinaro réussit un de ses meilleurs films, si ce n'est le meilleur, et il trouve en Jacques Brel l'interprète idéal pour ce type de personnage libre et bon vivant, qui rejoint des traits de caractère de certaines de ses chansons, le rôle semble d'ailleurs avoir été écrit pour lui, Brel trouve sans aucun doute son meilleur rôle dans ce personnage.
Il est bien entouré par une bande d'acteurs épatants comme Blier, Dalban, Frankeur, Préboist et la jolie Claude Jade ; la truculence des dialogues, les situations gaguesques par endroits, le ton libertin, la spontanéité, la joie de vivre et la bonne chère constituent un ensemble XVIIIème siècle des plus réalistes. Voila une certaine qualité de cinéma français comme on n'en fait plus, un film d'une grande fraîcheur, une comédie satirique et de moeurs qui fait du bien et qui vaut cent fois les bouses qu'on nous vend aujourd'hui.