Entre son triomphe dans le registre fantastique («Le sixième sens») et sa participation à la comédie romantique agaçante de Rob Reiner («The Story of Us»), Bruce Willis s'amuse dans une farce policière très sympathique.
Décidément Bruce Willis a la côte dans le monde du cinéma. Il sort d'un incroyable succès où il incarnait un personnage tout en retenue et très émouvant face à un enfant terrorisé par son «sixième sens». Avec «Mon voisin le tueur», il touche à un genre qu'il n'a pas l'habitude de côtoyer: la comédie.
Il incarne Jimmy The Tulip, un tueur à gage de Chicago qui, au sortir d'une importante peine de prison, vient s'installer incognito dans un quartier résidentiel de Montréal. Son voisin (Matthew Perry), un dentiste pépère le reconnaît et voit très mal l'arrivée de cette brute dans la maison d'en face. Par contre sa femme (Roseanna Arquette) pense qu'il pourrait les aider à combler leurs dettes. Elle propose à son mari de se rendre à Chicago pour qu'il dénonce Jimmy à son pire ennemi (Kevin Pollack) en échange d'une très grosse somme d'argent. De nature faible et totalement sous le joug de cette mégère, ce dernier n'ose s'opposer à sa volonté et s'envole pour les Etats-Unis. Sur place, il rencontre l'ex-femme de Jimmy (Natasha Henstridge) et en tombe éperdument amoureux. De retour à Montréal, il va de surprises en surprises. Jimmy apprend son idylle avec son ex. Sa femme s'est payé les services d'un tueur pour l'éliminer afin de garder le magot pour elle seule. Et l'assistante de son cabinet s'est transformée en tueuse après sa rencontre avec son idole, Jimmy. Le voilà perdu entre tout ce petit monde au moment même où le boss de Chicago débarque pour faire sa peau à Jimmy.
L'intérêt principal de cette comédie noire repose sur un scénario malin qui fonctionne comme une pièce de boulevard. Le réalisateur Jonathan Lynn prend un malin plaisir à plonger ses personnages dans des situations de plus en plus rocambolesques, jouant sur les rebondissements. Pour arriver à ses fins il s'entoure d'une distribution en parfaite osmose.
Il y a tout d'abord le protagoniste central: un homme ordinaire auquel le spectateur s'attache d'emblée. Il est incarné par un des comédiens les plus populaires de sa génération grâce à son rôle de Chandler Bing dans la série à la mode que l'on ne présente plus : «Friends». Matthew Perry s'acquitte de sa tâche avec beaucoup de talent. Il est le dindon de la farce, celui qui dérègle les rouages de l'intrigue, celui qui amuse par sa gaucherie.
Ensuite on trouve son épouse insupportable interprétée par une Roseanna Arquette déchaînée que l'on n'avait pas vue aussi bonne depuis sa courte et mémorable prestation de «Pulp Fiction». En restant dans les rôles féminins, on peut souligner l'honorable travail du Top Model Natasha Henstridge qui fait ce que l'on attend d'elle: être belle et faire tourner la tête au héros. Côté mâle, Kevin Pollack prouve une nouvelle fois qu'il est l'un des meilleurs seconds rôles américains. Il se fond dans la peau d'un chef de bande avec un humour exacerbant, jouant sur les tics de son personnage.
Enfin, Bruce Willis parvient encore à étonner. Il compose un tueur intelligent, charmeur et impitoyable à cent lieux de ses rôles précédents. Il n'abuse pas de son charme ou de ses gros bras, mais évolue devant la caméra tout en finesse, bénéficiant d'excellentes répliques et de gestes à la fois élégants et drôles qu'il effectue naturellement sans artifices. On finit par totalement l'oublier au bénéfice de son personnage. Ce véritable don comique transpire tellement de l'écran que l'on se met à regretter qu'il ne choisisse pas plus souvent des comédies enlevées comme «La mort vous va si bien» de Robert Zemeckis ou ce «Mon voisin le tueur».
Grâce à ce casting explosif, Jonathan Lynn renouvelle la réussite de son «Mon cousin Vinny». Il emballe une comédie policière sympathique, rythmée et très drôle. Il faut dire que la musique de Randy Edelman supporte le film à merveille. Le compositeur habille chaque protagoniste d'une courte mélodie puisant dans le jazz, le funk et le blues. Il participe ainsi à la psychologie des personnages et soutient l'attention du spectateur subtilement et de façon naturelle. Comme le film, sa partition est entraînante et espiègle.