Monica
5.9
Monica

Film de Andrea Pallaoro (2022)

Transexualité en mode pur ciné indé US.

Le réalisateur italien Andrea Pallaoro en est à son troisième film. Le premier (inédit), « Medeas », a été tourné au Mexique avec des acteurs du cru. Le second, « Hannah », le fut en France avec des comédiens francophones - dont Charlotte Rampling - et nous avait laissé un souvenir mortel d’ennui à force de mystères, de lenteurs et d’une œuvre sibylline qui ne racontait pas grand-chose. Son troisième que voilà, « Monica », a lui été filmé aux Etats-Unis avec des acteurs américains. Il suit donc une certaine logique et nous livre un long-métrage un peu moins poseur et moins hermétique mais qui ne parvient pas non plus à passionner. Ce cinéaste semble avoir des tics arty indécrottables. Il filme son histoire dans la plus pure tradition du cinéma indépendant américain dont il reprend certaines manies pourtant devenues périmés depuis une bonne décennie (si ce n’est pas deux!) : format d’image carré qui n’apporte rien, image granuleuse pas très esthétique et surtout des plans qui s’étirent plus que de raison et surtout pour rien. On ne compte plus le nombre de séquences qui auraient pu être coupées au montage ou d’autres largement raccourcies à leur minimum utile. On voit Monica se laver les cheveux, Monica conduire, Monica pleurer, ... Elle est de tous les plans et dans toutes les situations sauf qu’une bonne partie s’avère inutile ou bien trop longs. Comme si Pallaoro se regardait filmer dans un trip cinématographique qui n’embarque pas grand monde sauf lui. Heureusement, malgré tous ces défauts qui virent presque au cliché d’un certain cinéma US moribond, héritier des premiers festivals de Sundance, on se laisse quand même embarquer de manière sporadique...


L’autre souci majeur de « Monica » est le même que celui de « Hannah ». Il y a trop de non-dits même si c’est moins prononcé. Ici, on suit donc une jeune femme transsexuelle qui a fui sa famille et sa région natale pour refaire sa vie. L’appel de sa belle-sœur la fait revenir pour s’occuper de sa mère malade. Monica doit donc faire face aux fantômes du passé et à une mère qui ne la reconnait pas en femme au premier abord. On suppose donc des frictions familiales passées et un rejet de l’identité de Monica par les parents. Mais on n’en saura pas plus sur le pourquoi du comment, comme le rôle du défunt père par exemple. Tout est écrit en pointillés, ce qui n’est pas toujours forcément une mauvaise chose mais peut s’avérer frustrant. Et là c’est un peu trop poussé et cela annihile toute l’émotion qui aurait pu naître de ce drame familial. On est trop gardé à distance en tant que spectateur, le cinéaste confondant retenue et froideur. Un tel scénario aurait pu certes être trop tire-larmes mais là il nous laisse étonnamment impassible face à ce qui se passe.


Pourtant, il fait plaisir de revoir la trop rare et excellente Patricia Clarkson mais même cette grande actrice ne peut faire grand-chose avec un rôle de mère malade écrit comme celui-là. Par moments, on peut voir l’étendue de son talent mais il est enfermé par une mise en scène qui tient encore une fois à distance. Quant à l’actrice principale, elle n’est pas mauvaise mais demeure un peu trop mono-expressive. Dans cet océan de mutisme et de longueurs, il y a pourtant quelques très belles scènes inspirées voire poétiques (le pique-nique au lac, une scène dans le lit voyant un fils s’allonger contre sa mère, ...) pleines de douceur mais il faudra accepter toutes celles plus anodines voire ennuyantes. Pour ce qui est de la fin, elle est conforme à la teneur du film en général : opaque en plus d’être particulièrement abrupte, comme si le cinéaste ne savait pas comment clore un film au final peu emballant et qui, avec un beau sujet comme celui-ci, aurait pu être merveilleux.


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JorikVesperhaven
5

Créée

le 6 mai 2024

Critique lue 19 fois

Rémy Fiers

Écrit par

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