Monsieur Klein par Sophia
Comme toujours avec Joseph Losey on frôle le génie. La mise en scène est toujours aussi sublime. Personnellement la manière de filmer les gens ordinaires et de rendre les petits incidents de la vie important, de s'attacher aux détails, et aux bizarreries de la vie, aux hasards curieux me rappelle pas mal Polansky. Il y a toujours une image dans ses films qui part d'éléments réalistes ici la grisaille de Paris et la rend sublime, lui donne un petit quelque chose de fantastique sans en faire trop. Dans Monsieur Klein, c'est l'univers de la bourgeoisie parisienne qui est gris et gindé, l'univers des prolétaires est quand à lui bordélique, fourmillant, coloré. Il y a aussi l'opposition des personnages, l'univers très lissé du héros, un univers froid où tout le monde est méchant, en veux aux autres, où la mesquinerie est à chaque détour, et puis il y a l'univers de l'autre, de son double, énigmatique, étrange, incohérent, virtuose, mystérieux, oscillant entre le château à la campagne et son faste d'un temps révolu, et le milieu populaire parisien. Le tout est emporté dans un espèce de train pour la tragédie. Tout va trop vite pour qu'on en saisisse bien les conséquences, ça va même trop vite pour le héros et les personnages. On est prit dans l'histoire avec un grand H. Il y a ce magnifique dialogue du père du héros sur l'indifférence alors que justement autour d'eux se joue un moment tragique de l'histoire, un moment que le héros va vivre de plein pied. Déchirant ce film est d'autant plus fort qu'il navigue entre les eaux troubles et qu'on ne sait jamais trop à quelle sauce on sera mangé.