Georges Clooney aime le rappeler sur les plateaux télé et dans ses films : c’est un homme engagé. Il profite (à raison) de sa célébrité pour attirer l’attention du grand public sur des sujets qu’il juge importants. Après la liberté des médias (Good Night, and Good Luck) et la corruption des politiques (Les Marches du Pouvoir), Georges veut nous parler d’Art et de patrimoine mondial.
Dans Monuments Men, Georges réussit à convaincre Matt Damon, Bill Murray, John Goodman, Jean Dujardin, Hugh Bonneville et Bob Balaban (tous reconvertis en architectes ou historiens pour l’occasion) de partir en Europe en pleine Seconde Guerre Mondiale afin de récupérer des œuvres d’art volées par les Nazis et les restituer à leurs propriétaires. Georges joue son Georges nonchalant et beau gosse, Jean Dujardin fait son petit numéro de bon français entouré d’américains et John Goodman continue dans son rôle de sidekick incapable de courir 200 mètres mais avec un cœur plus gros qu’un pot de Nutella. Du jamais vu.
« No piece of art is worth a human life », cela ne vous rappelle rien ? C’était déjà la maxime du thriller (aussi embrouillé que sophistiqué) Trance de Danny Boyle sorti l’année dernière. Sauf que Georges, il n’y croit pas vraiment. Sauver l’Art au péril de quelques vies était presque aussi important et honorable que sacrifier des milliers de vies pour gagner la guerre. Quand de nombreux réalisateurs s'évertuent à montrer les horreurs de cette dernière et la souffrance des hommes, Georges filme une virée entre vieux potes à travers la France, la Belgique et l’Allemagne. Les très méchants nazis sont présents mais peu inquiétants. Il y a bien quelques scènes pour rappeler qu’une guerre est une guerre - avec balles tirés, sang sur le sol et lettres destinées aux familles – mais avec Georges, la violence n’est jamais gratuite. Dans une période aussi vue et revue que la Seconde Guerre Mondiale, Georges veut éviter de nous rabâcher les scènes déjà bien présentes dans nos esprits - il joue même avec le mythique Débarquement d’Omaha Beach où les protagonistes posent le pied dans un cadre paisible, sans un seul coup de feu. C’est tout à son honneur, mais les deux heures de film ne se remplissent pas toutes seules. A la place, on nous sert une chasse aux trésors dénouée d’émotion. Certains personnages connaîtront (très rapidement) les difficultés de la guerre, comme passer Noël loin de sa famille… Matt Damon, quant à lui, devra juste faire attention à ne pas couler son mariage devant les avances de la parisienne libérée (dans tous les sens du terme) Cate Blanchett. En un mot : chiant.
Georges avait un livre à adapter, un casting solide (qui doit faire rougir bon nombre de réalisateurs), des gentils américains, des méchants nazis et un beau message. Il ne lui manquait plus qu’à ajouter quelques scènes d’action pour tenir le spectateur éveillé et c’était plié. On aurait salué le point de vue original de Georges, le devoir de mémoire. Mais Georges n’aime pas faire comme tout le monde. Georges est un intellectuel qui refuse la violence et la mort comme divertissement. Il peine alors à remplir son film et dessert finalement son propos. Le quinquagénaire le plus hype et engagé d’Hollywood veut nous prouver que sauver l’Art, c’est du serious business. Difficile de vous croire, mon cher Georges, quand votre mission apparaît comme un ennuyeux road trip champêtre à travers l’Europe.
Le point Histoire : Le programme Monuments Men a bien existé mais ce sont près de 300 hommes et femmes venus de 13 pays qui se sont engagés dans cette mission, validée par le président Roosevelt. Les sept hommes sont bien inspirés de personnalités réelles, ainsi que le personnage résistant de Cate Blanchett. Le film avance que 5 millions d'oeuvres d'art ont été récupérées grâce à cette mission, un nombre qui a bel et bien été validé.