Oscar du meilleur film 2017. Est-ce mérité ou politique ? La réponse est évidente une fois qu'on a vu le film !
3 chapitres, 3 âges différents, 3 noms, 1 seule vision des choses. Little premièrement. Petit bonhomme complètement paumé, du fait de l'absence de père et d'une mère toxicomane. Il trouvera dans Juan la figure paternelle et aimante dont il manque cruellement. Little parle peu, ne sourit jamais, baisse toujours la tête et rentre ses épaules. Tout son être exprime la souffrance de se sentir différent et rejeté. Puis Little laisse la place à Chiron, qui a pris quelques années (et quelques centimètres). Rien n'a changé dans son attitude, probablement parce que son environnement n'a pas évolué non plus. Il subit les injures, reçoit des coups mais jamais ne se plaint. Jusqu'à ce que la marmite, sous pression, explose. On le retrouve plus tard, alors dans la peau d'un adulte, Black. Le lycéen s'est métamorphosé, il n'a plus à rien à voir avec le gringalet du chapitre précédent : grand musclé, torse en avant et tête tournée vers l'avenir. Jusqu'à ce qu'un bout de son passé le rattrape...
Moonlight est écrit et tourné tout en finesse. C'est aussi ce qu'on pourrait lui reprocher, surtout avec un sujet aussi fort que l'homosexualité dans le milieu afro-américain. Mais ce film ne se résume pas à ça. C'est aussi l'occasion d'aborder l'extrême pauvreté, les réseaux de drogue, les quartiers délaissés par les autorités... Little en est le parfait exemple : il a été oublié par tous. Son père, sa mère, ses professeurs, les politiques. Rien n'est fait pour aider les jeunes à sortir de la misère et de la violence.
Le titre est très évocateur : "Moonlight" ou "la lumière de la lune". On retrouve cette lumière dans chaque plan. La réalisation est classique mais merveilleuse. C'est comme se retrouver dans un musée : tout est coloré et bien rangé, les tableaux sont splendides à regarder. Notre attention glisse sur certains (certainement moins réussis) pour mieux se fixer sur d'autres. Moonlight se regarde.
La performance des acteurs est bluffante, notamment pour les interprètes de Little, Chiron et Black. Pas besoin d'entendre le nom du personnage pour savoir que c'est lui, avec quelques années de plus. Ils ont su capter les mimiques, la manière de se mouvoir, de se tenir. Je l'ai dit, les messages envoyés par le corps sont primordiaux dans ce film. Mais plus que ça, il y a aussi cette justesse dans les regards, qui en disent plus long que les dialogues et rend le silence roi.
Ce film est bouleversant. Peut-être pas au point de mériter l'Oscar du meilleur film, ni toutes ces critiques positives sur son affiche... Mais assez pour qu'on s'en souvienne.