Certainement un des films les plus intéressants de ces dernières semaines, avec un sujet bien moins consensuel (certains diraient "casse gueule") que "La La Land" dont tout le monde, dans un élan enthousiaste un peu incompréhensible (pour moi, en tout cas), sacre le génie (qui vient d'être partiellement validé par les Oscars).
Ce qui est particulièrement "bien vu" dans ce magnifique long métrage, c'est l'utilisation d'un trio d'acteurs pour raconter 3 parties bien distinctes de la vie de Chiron, un jeune homme "africain américain" comme il est d'usage de qualifier désormais la communauté noire aux Etats-Unis.
On le voit d'abord enfant, vivant dans un quartier peu recommandable de Miami, il est surnommé "Littlle", puis adolescent, une période clé dans ce film, où Chiron ressent le trouble qui est en lui, quand il est au plus près de son meilleur ami, Kevin, puis, enfin, adulte, devenu "Black", complètement métamorphosé, régnant sans partage dans le quartier de son enfance...
Outre la composition absolument grandiose des 3 acteurs, Alex R. Hibbert (Little), Ashton Sanders (Chiron) et Trevante Rhodes (Black), qui ont quelque chose de commun dans le regard, c'est toute l'articulation du film qui est particulièrement bien pensée, avec un fil conducteur très fort entre les 3 périodes, ces relations compliquées de Chiron avec sa mère, junkie en permanence défoncée, qui n'a rien à donner d'autre à son fils que des reproches et des insultes.
Il y a ce refuge chez Teresa et Juan, qui l'initie à la vie, toujours présent, comme un père de substitution... Ce refuge qu'il retrouvera toute sa vie, d'enfant à adulte.
On ne compte plus les scènes fortes, sans pathos excessif, qui nous font comprendre combien il est toujours difficile, y compris de nos jours, d'être noir et homosexuel dans un pays qui vient de prendre un chemin bien trouble et inquiétant..
L'Oscar du meilleur film vient d'être attribué à Barry Jenkins pour "Moonlight", ce n'est pas volé, et bien plus justifié que de l'avoir attribué à "La La Land"... (ils ont essayé, pourtant..)