A la base, Mortal Kombat, c'est un peu le jeu des interdits, auquel je jouais chez un ami. Je vous parle d'un temps bien particulier, celui du milieu des années 90 à Metz, une base propice à un film social, bercé par le fantôme de Patrick Deals (pauv' vieux). Du coup, Mortal Kombat, le principe, était quand même baigné de l'aura du pendant ultra-violent de Street Fighter et pour quelqu'un qui, comme moi, n'attachait pas énormément d'importance à la technique mais plus au paraître, c'était cool. Mais un peu raide. Enfin, moi, j'avais le deuxième opus sur game boy, j'y jouais beaucoup, même si, finalement, je trouvais ça un peu chiant. Le film, je ne l'ai pas vu au cinéma, je lui ai préféré Street Fighter, sorti peu après. Nan, en fait, le métrage était tombé dans la catégorie des films "que je croivais avoir vu, mais qu'en fait non". Du coup, séance de rattrapage avec un ami qui m'explique que le titre hurlé au début, c'est bien celui du film, mais sans les consonnes. Ce qui donne... enfin, vous voyez.
Ah, cette horrible musique qui coiffe le film comme une énorme bifle, ça a son charme. Comme la bifle en fait. Mais bref, le métrage, lui, aimerait beaucoup rester fidèle au matériel d'origine et narre ainsi les aventures d'une belle bande de guignols tombés par hasard dans le Mortal Kombat, un tournoi d'une certaine importance, puisque s'il est gagné dix fois d'affilé par l'Empereur régnant dans le royaume d'outre-terre, ce dernier envahira la Terre. Vous me direz, dix fois de suite, c'est quand même pas gagné. Seulement voilà, Raiden, que le sort de la Terre préoccupe, explique à nos trois héros que ça fait déjà neuf fois que l'Outre-Terre gagne et que là, va falloir se bouger un peu. Raiden, le gars qui se secoue qu'au dernier moment. Enfin, faut pas lui en vouloir, le bougre n'est jamais qu'un dieu - et celui de la foudre. Qui ricane comme un demeuré. Le reste du panthéon doit quand même bien envoyé.
Assez fidèle à l'histoire originelle des jeux, Mortal Kombat est pourtant une sacrée belle bouse. Ouais, d'entrée de jeu, comme ça. Parce que je ne voudrais pas être taxé de suffisance, expliquons un peu et mieux, attaquons par les bons côtés. Le fait est que Paul a l'air de s'investir dans son adaptation et en ça, on ne pourra pas lui reprocher de prendre le truc par-dessus la jambe. De l'histoire qui est presque mot pour mot celle du jeu, aux décors - en passant même par les personnages - tout le matos présent est, dans l'ensemble, une bonne restitution du contenu du jeu. Après, faut savoir ce qu'on veut : le jeu disposait quand même d'un niveau de kitsch assez élevé, cela se ressent encore sur pellicule. Au niveau des trucs cools, on pourra aussi citer la présence de Goro, franchement classe, tout en animatronique et qui, sincèrement, vieillit plutôt bien. Mieux que les incrusts dégueux et les CGI foireux, comme pour Reptile, mais ça, c'est pas de bol.
Le gros grand souci du métrage va tenir surtout - oh bon sang - dans le manque de clairvoyance - et sans doute de moyens - de l'équipe. Parce que je pense qu'avant Mortal Kombat, je saisissais pas trop l'expression "aberration chromatique"... eh ben merci Paul, on est en plein dedans. Bim, direct dans l'action. Entre les néons violets cachés dans les alcôves de ton temple anciens, les verts qui, paf, viennent s'emplâtrer dans les décors. On dirait parfois que le film a été intégralement tourné dans une boîte de nuit remaquillée à la va-vite. C'est totalement hallucinant. D'ailleurs, les décors sont, pour la plupart, au diapason. L'affrontement Scorpion-Johnny Cage se finit quand même dans un espèce de dépotoir, conçu à partir des restes volés sur le plateau du "Temple Maudit". Il y a, derrière la réflexion sur la lumière, une véritable ambition de faire n'importe quoi, n'importe comment. Vous me direz, ce n'est pas très grave, au final, Paul ne sait pas vraiment tenir sa caméra et on sent même - dans la consternation la plus évidente - que le montage est mollasson comme tout, donnant aux combats une bonne dose et de kitsch (les décors) et de ce sentiment indescriptible que vous pourriez éprouver en regardant deux paraplégiques se pourchasser énergiquement.
Et il ne faut pas croire que, niveau acteur, on soit dans le bon filon : Christophe Lambert fait le service minimum. En fait, il donne tout simplement l'impression de s'être planté de plateau. Faut avouer - sans vouloir pardonner Lambert - que Raiden est particulièrement inutile dans l'intrigue, se contentant de jouer les Captain Obvious et de conclure son apparition par un "je t'ai appris tout ce que je savais" alors même qu'il a profité des daiquiris pendant tout le tournoi. Classe. Si on échappe de peu à Eric Roberts pour camper le méchant, il faut avouer que Cary-Hiroyuki "Bad Chinese" Tagawa n'est pas mal non plus dans son genre. Constipé dès le début du tournage, ses apparitions sentent la souffrance et son visage se crispe à la moindre remarque. Kano est particulièrement encombré par une interprétation de méchant lambda je-m'en-foutiste. Parce que tous les méchants s'en foutent royalement, de gagner. J'vous jure. Les héros ne s'en tirent pas non plus et d'ailleurs, on saluera au passage Bridgette Wilson, qui voulait la jouer badass et refusa d'être doublée pour ses scènes d'action, rendant parfaitement ridicule ses affrontements (surtout avec Kano, d'ailleurs). Mais ce serait injuste de ma part de souligner les faiblesses du jeu de Bridgette sans tacler ses deux camarades masculins : surtout que Linden Ashby (Johnny Cage) ne sait pas forcément beaucoup mieux se battre et cabotine comme un fou, pendant que Robin Shou tente bien de montrer que lui, il maîtrise son Kung-fu, mais avec un montage raté, ça ne donne pas grand chose.
Enfin, tous ces mauvais aspects ne sauraient remplacer LE mauvais aspect du film. Jusqu'à présent, j'ai franchement fait dans le facile en appuyant là où ça saignait déjà : a priori, tous ces mauvais points, vous les attendez presque en lançant un film comme Mortal Kombat, donc rien d'exceptionnel. A mon sens, le vrai truc naze du film, c'est qu'au final, c'est rien de plus que le jeu. Tout aussi kitsch, avec des personnages limpides (le sang en moins, par contre). Pas un moment, le film ne tente de s'écarter du credo officiel. D'un côté, on est d'accord, les années 90, à chaque fois que ça s'éloignait un tout petit peu, ça puait grave mais en même temps... un jeu de combat, donnant lieu à un film où les combats s'enchaînent dans la confusion la plus totale, avec rarement de liant entre deux séquences, ben c'est exactement le jeu, mais avec des mauvais acteurs. Alors ok, on passe sans doute à côté du naufrage total - grâce à sa (trop) grande fidélité - mais quid de l'intérêt ? Autant se lire vite fait le wiki et rire devant la simplicité de l'intrigue, nan ?