Mother s'apparente plus à une expérience viscérale qu'autre chose, nous plongeant dans nos plus profonds retranchements, comme le réalisateur avait pu le faire dans Requiem for a dream. La bonne idée D'Aronofsky est d'avoir représenté la grande histoire (biblique) dans la petite histoire, celle d'une femme, future mère de famille en pleins travaux pour bâtir un havre de paix pour son futur fils et son mari, écrivain en quête d'inspiration pour son futur livre. En nous mettant dans le point de vue de cette femme qui va progressivement vivre un véritable cauchemar, l'identification du spectateur face au personnage va s'effectuer naturellement, aidé bien évidemment par le jeu fantastique de Jennifer Lawrence qui trouve ici rien de moins que son meilleur rôle. Elle sera filmée tout le temps, sans lui laisser un seul temps de répit, en temps réel et quasiment chaque fois en gros plan, montrant son enfermement face à la situation qui la dépasse. Le travail sur le son est ahurissant, renforçant cette idée de cauchemar permanent auquel le spectateur ne peut pas échapper. Aronofsky fait ici une synthèse tout à fait nihiliste de la vie sur Terre, en montrant toutes les atrocités faites sur celle-ci, telles que les guerres, le fanatisme exacerbé qui conduit ni plus ni moins au meurtre d'un enfant, la destruction de la maison (la Terre donc) au profit de chacun... Le spectateur ne sort donc pas indemne du film, en témoigne la dernière demi-heure du film où tout s'enchaîne quasiment en plan-séquence à travers la photographie sublime de Matthew Libatique (rarement 30 minutes auront été aussi intense et jusqu'au boutiste ces dernières années), offrant un spectacle aussi réjouissant côté mise en scène qu'inconfortable pour le spectateur. Ce n'est ainsi pas étonnant que le public ait vite décampé des salles de cinéma dans les dernières minutes, sans doute s'attendait-il à un film d'horreur classique, en plus il y a l'actrice de Hunger Games ça va être sympa...oh que non si seulement ils avaient su... Parce que le cinéma est-il seulement fait pour nous laisser dans notre zone de confort, nous faire poser notre cerveau pour vivre une expérience agréable? N'est-il pas aussi fait pour nous questionner, nous faire vivre des expériences viscérales, qu'elles soient agréables ou non? Aronofsky signe ainsi un film pour le moins hors du commun, qu'on est pas prêt d'oublier avant longtemps. Tous simplement divin!