J'ai vu Mulholland Drive en salles, à sa sortie en 2001, et n'ai absolument rien compris. Ça ne m'a pas empêché d'adorer le film pour son ambiance onirique, sa musique et sa direction photo atypique. Le film est intensément mystérieux, deux actrices magnifiques s'y embrassent à pleine bouche, et la mise en scène inimitable de Lynch brille aussi bien dans l'intimisme feutré que dans le bizarrement oppressant.
10 ans plus tard, j'ai revu le film et l'ai enfin compris. Encore 10 ans plus tard, j'ai tout oublié de ce que j'avais compris mais mes quelques bribes de souvenirs m'ont permis de reconstruire le puzzle. Et quel puzzle ! Le film ne donne pas des masses d'indices et de clefs, et il est très probable que la plupart des spectateurs n'y comprendront rien au premier visionnage. Et c'est tant mieux.
Quel intérêt de voir un film auquel vous ne comprenez strictement rien ? Cela dépend beaucoup de votre affinité avec l'ambiance et le style de l'œuvre, et si vous acceptez de vous laisser porter par l'ambiance plutôt que vous débattre pour lui donner à toutes forces du sens.
C'est cette capacité d'abandon et un goût certain pour l'étrange et le surréaliste dont dépendra votre appréciation de Mulholland Drive, une expérience sensorielle unique qui reste selon moi le chef d'œuvre de son auteur et paradoxalement l'un de ses films les plus accessibles.
Parce qu'en plus d'être délicieusement étrange à regarder sans rien y comprendre, on peut prendre plaisir à le savourer après la projection, quand vient le temps de déchiffrer l'histoire, remettre les pièces dans l'ordre et les personnages au bon endroit. Ce n'est pas parce que vous entendez de la musique qu'il y a réellement un orchestre : tout ceci n'est qu'une illusion.