We 're a happy family!

Une famille britannique riche et sans père kidnappe des hommes seuls et les force à participer à un jeu de rôle élaboré dans lequel ils sont la famille parfaite ; ceux qui refusent ou tentent de s'échapper sont tués rituellement.

Mumsy, Nanny, Sonny & Girl est une comédie horrifique de Freddie Francis de 1969.
Le scénario est de Brian Comport d'après la pièce de Maisie Mosco.

Ce film appartient à la longue liste des films injustement méconnus qui méritent, à mon avis, un petit coup de projecteur...

Il s'agit d'un film de genre original plutôt réussi dans lequel le metteur en scène de La chair du diable et d'Histoires d'Outre tombe raconte l'histoire de 4 personnes vivant à l'abri du besoin dans un magnifique chateau, dans la campagne britannique. Nanny (La gouvernante), Mumsy (La mère, chef de famille en l'absence d'un père), Sonny (L'adolescent) et Girl (L'adolescente typically british).

We're a happy family!

Pendant que Mumsy et Nanny tricotent et bavardent en prenant le thé toute la journée, les 2 adolescents errent en ville en quête de compagnon de jeu. Leur proie identifiée, ils la ramènent au chateau afin de la soumettre à des jeux pervers sous le joug de règles strictes. L'infortuné est souvent exécuté lorsque l'un des protagonistes s'est lassé de lui.

Mumsy, Nanny, Sonny & Girl, c'est une certaine vision dévoyée de l'Angleterre. Ses aristos décadents, les uniformes scolaires portés par des ados pervers en quête de mauvais coup et des règles de vie tyranniques à géométrie variable. A la manière d'un conte étrange et cruel souvent comique, Girl (Vanessa Howard) et Sonny vont mettre la main sur une victime pas comme les autres. Cet homme appelé par ses ravisseurs Numéro 2 (Michael Bryant) va réussir à mettre un certain désordre dans l'organisation bien huilée du clan...

Mumsy, Nanny, Sonny & Girl est intéressant à plus d'un titre. Son scénario est construit à la manière d'un conte aux enjeux pervers. Le film débute par la description du chateau et de son parc, sur fond de voix off suffisamment maniérées pour être inquiétantes. Ses protagonistes sont décalés, souvent pervers. Sonny le garçon est toujours pressé "d'en finir" avec les "invités". Mumsy est un peu nymphomane, elle n'hésite pas à contraindre ces hommes de passage à coucher avec elle. Girl est une jeune fille qui ne peut vous laisser indifférent. On discerne chez l'adolescente, savant mélange d'innocence feinte et de perversité, affriolante dans son uniforme scolaire, l'envie de quitter le monde de l'enfance compte tenu de son goût pour la dépravation.

Sociologiquement, l'ensemble est plutôt bien vu quant on sait que la société britannique repose sur des fondements fortement hiérarchisés, ce fut longtemps une société de castes où les "gueux" étaient à la disposition de l'élite...

Par sa photographie et son univers étrange, Mumsy, Nanny, Sonny & Girl fait inévitablement penser à certains films britanniques des seventies mais également à la série Chapeau melon et bottes de cuir (The Avengers), notamment les saisons couleurs 5 et 6 avec Diana Rigg et Linda Thorson.

Freddie Francis y évite l'écueil de la violence gore, en privilégiant les scènes suggestives et en ménageant quelques instants comiques, souvent grinçants.

La carrière du film fut contrariée par la critique

Le film s'inscrit dans le filon des productions jugées à l'époque ouvertement sexuelles ciblées sur les mods et le Swinging London. Il y a dans le ton de douce folie du film quelque chose qui n'est pas sans rappeler le cinéma de Stanley Kubrick, surtout Orange mécanique qui sortira un an plus tard.
Le film sera pourtant dénoncé par la presse comme une oeuvre scandaleuse à sa sortie. Une scène du début du film suggérant l'inceste entre Sonny et sa soeur (La jeune fille suce un bonbon que son frère lui a mis dans la bouche ) fera violemment réagir les "chiens de garde" des médias britanniques. Pour donner davantage de poids à leur critique, ceux ci feront le lien avec un autre film de genre britannique sorti en même temps, Goodbye Gemini, un film d'horreur sorti la même année dans lequel un jeune homme tombe amoureux de sa soeur .

Cette injuste campagne de dénigrement fera mouche auprès de l'opinion.

Contrairement à de nombreuses productions horrifiques contemporaines mettant en scène des familles de dégénérés reposant sur des scénarios squelettiques, Mumsy, Nanny, Sonny & Girl exploitait la veine du film de genre avec un scénario subtil et beaucoup de fantaisie. Le film est servi par un casting de qualité (Ursula Howells (Mumsy), Vanessa Howard (Girl)...).

"Montré du doigt" en Angleterre, le film marchera relativement bien aux Etats-Unis.

Déçue par la campagne de dénégation du film, la troublante Vanessa Howard se retirera des plateaux, se mariera avec un producteur et quittera le monde du cinéma, quel dommage....

Trailer vo

Photos du film

Ma note: 7/10