Cinq sœurs, libres et légères comme l'air. L'air qu'elles respirent devient vicié. Vicié par les pensées paternalistes et conservatrices de leur grand-mère et oncle. Oncle qui s'impose, prive, interdit, leur construit une prison. Prison dans laquelle elles continuent de rire et rêver. Mais les rêves laissent place à la réalité : cours de cuisine, de ménage, de bonne femme. Femmes, elles le deviennent de force. Et c'est de force qu'elles sont mariées à des étrangers. Mais, entre elles, rien n'est étrange. Elles restent entières, aiment, rient, s'entraident, profitent du moindre instant de liberté, expérimentent les limites.
Limites... De notre France du XXIème siècle, nous avons l'impression de ne plus en avoir. Mais, en Turquie, elles existent toujours, ramenant la femme à un objet. Sois belle et tais-toi. Elles refusent de se taire et c'est ce qui fait la force de ce film. Fort par la puissance des liens entre ces sœurs, fort par les dialogues, mais aussi par les silences et les non-dits. Non-dits qui font de nous des complices, même si nous sommes à des centaines de kilomètres de ces demoiselles. Une fois qu'on a vu ce film, on ne peut plus rester les bras croisés. La croix est le symbole du Christ, qui n'a pas résisté. Nous, spectateurs de Mustang, nous nous devons de résister, de hurler notre dégoût envers ces idées arriérées. Le pari est donc gagné pour la réalisatrice : elle a su, à travers sa caméra, ses plans lumineux, ses comédiennes justes, son scénario bien ficelé, nous émouvoir et nous donner l'envie d'être, nous aussi, des mustangs fougueuses, lancées, qui ne s'arrêteront et ne plieront jamais face aux idées machistes.