Dans la Turquie profonde, cinq soeurs respirant la joie de vivre malgré la mort de leurs parents sont élevées dans la tradition par leur oncle et leur grand-mère.
Un soir, en sortant de l'école, après avoir dit adieu à leur professeur, elles vont se promener au bord de la mer et se laissent entrainer par des camarades dans une innocente partie de "cavalier".
Accusées d'indécence caractèrisée par une voisine qui les a vues se frotter à des garçons, elles voient leur foyer se transformer en prison de plus en plus fermée et en usine à épouses. Les murs se réhaussent progréssivement au cours du film, les femmes du village se succèdent dans la maison pour transformer ces dévergondées en parfaites maîtresses de maison. Le jardin d'Eden dans lequel elles vivaient devient une arrière-cour sinistre et gardée par la communauté liberticide.
La cérémonie du thé, la cuisine, la couture sont désormais les seules matières qui leur seront enseignées.
Lale, la plus jeune et la plus intelligente, la rebelle de la fratrie, raconte au spectateur incrédule l'histoire de Sonay, Selma, Ece et Nur.
Leurs destins, leurs choix, leurs hommes. Elle voit tout, comprend des choses censées rester secrètes.
A travers le cas particulier de ces cinq jeunes femmes, il est montré la complexité de la condition féminine en Turquie et ailleurs.
L'une des plus belles scènes du film se situe sur un lit. La tentative de soumission a commencé mais ces soeur se montrent solidaires au propre comme au figuré. On voit leurs corps entremêlés, soudés et leurs membres indissociables les une des autres.
Les mêches de leurs longs cheveux bruns se confondent et se mélangent pour ne former qu'une seule chevelure appartenant à un seul corps. Les jeunes filles ne se distinguant pas facilement physiquement de prime abord apparaissent comme un tout
Ce combat féministe parle de l'histoire de la réalisatrice.
Elle a écrit et réalisé cet hymne à la liberté en profitant de sa double culture (turque et française) qui lui a permis d'avoir le recul et la connaissance nécessaires sur les traditions de son pays natal.
Ce film sur l'insoumission dénonce une réalité incontestable de la Turquie entre modernité et conservatisme patriarcal.
Le seul reproche (qui n'en est pas vraiment un) que je ferais au film est qu'il manque de mon point de vue une scène capitale.
Celle qui montrerait,
après le mariage de Selma, quand elle est ramenée par ses beaux parents comme un objet à vice cachée, une marchandise d'occasion de seconde main. J'aurais adoré voir le médecin qui inspecte l'intimité de la jeune fille qui vient de vivre sa première nuit de femme mariée sans saigner, venir dire aux parents : Votre bru est encore intacte, elle n'a pas saigné car votre fils est un mauvais amant et n'a pas su s'y prendre.