Louis Malle réserve décidément bien des surprises. Le dispositif minimaliste de ce film en est une. Mais ce n'est pas vraiment ce qui m'a intéressé, car on a vite compris. Et pas davantage ce que disent les personnages, car il ne saurait être question ici de "philosophie" ou de "réflexion" - pardon pour ceux qui y ont trouvé leur compte, mais ça me semble un peu trop généreux de considérer de la sorte ce qui relève à mon sens d'un bavardage vaguement intello insupportablement ennuyeux, répétitif et plutôt plat. D'ailleurs ne serait-ce pas le projet à l'œuvre ? Deux amis (amis, vraiment ?) se rencontrent (mais se rencontrent-ils vraiment ?) et pendant 1h45, il n'y a que du bavardage. Bavardage sur l'instant mystique qui ne résout rien, l'impossibilité des rencontres humaines, bavardage qui ne favorise jamais la rencontre, puisque le monologue (de l'un surtout : insupportable André) ne s'interrompt que trop rarement pour laisser place à un autre monologue, plus hésitant mais guère plus intéressant, celui de Wallace, quand il se décide enfin à articuler autre chose que de vagues questions. Mis en abîme par le film, le bavardage sur l'absence de sens n'apporte pas davantage de sens à ce dîner bavard qui s'achève comme il a commencé, dans la solitude, l'absence d'émotion, et le non-dit. C'est un film triste, sur l'irréductible solitude. En tout cas c'est ce que j'y ai vu, et pas grand-chose de plus. Une sorte de tirade à la Thomas Bernhard, moins la provocation, moins l'humour. Et j'ai au final un petit sentiment de "tout ça pour ça", tout en reconnaissant le courage qu'il a fallu pour oser un film pareil.