Voilà des jours que je tourne autour, incapable d’aligner des mots cohérents, tant je pense avoir tout (et tellement) dit à propos de ma fascination pour Audrey Hepburn. C’est vrai que je peux parler du film, qui est excellent, mais j’en suis à un point d’admiration où j’ai la conviction que tous les films dans lesquels elle a tourné, ne sont devenus chefs-d’œuvre que grâce à elle. Mais tout de même, celui-ci a plus que les autres. Une réputation qui le précède de très loin et qui résonne encore pour peu qu’on aime le cinéma. Un grand réalisateur aussi, auteur de nombreux autres œuvres fondatrices du cinéma d’aujourd’hui.
J’avais commencé par la version française, l’erreur fût terrible lorsque je me suis rendu compte que les chansons aussi étaient doublées et donc, adaptées. Je n’ai rien contre les comédies musicales françaises, sauf lorsque le Français n’est pas leur langue natale. J’ai toujours refusé d’écouter la version française de Hair, même avec à l’esprit un Julien Clerc tout nu. Ma médiathèque m’a donc gentiment prêté (moyennant cotisation en bonnet difforme) le film avec (j’ai vérifié) la version anglaise et les sous-titres français. Ma chérie et moi-même nous sommes donc installés pour 166 minutes d’humour, d’amour et de minauderies.
Quelle erreur ! Connaissant mon penchant pour la belle Audrey et l’amusement que met ma chérie dans sa jalousie, j’aurais dû anticiper mes réactions primitives, d’homme en extase devant l’incarnation de son idéal féminin. Je l’attendais cette robe, tant convoitée sur la jaquette du film, cette magnifique tenue blanche cousue à même son corps et assortie d’un chapeau extravaguant. À son apparition, un borborygme m’a bien sûr échappé et là, surprise, ma chérie était aussi admirative que moi. Je ne vous cache pas qu’alors, le lubrique en moi a imaginé sa chérie et Audrey, ensemble d’abord, pour lui tout seul. La chose s’est confirmée avec la robe de soirée époustouflante qu’Audrey porte avant la réception princière, mon palpitant en a manqué un battement, ma chérie de confirmer.
Mais le film alors, qu’en est-il ? Excellent comme attendu, un humour décapant sur la condition féminine et le niveau de considération que la condition masculine lui porte. Une critique acerbe des divisions sociales en vigueur à l’époque, avec des margoulins à peine plus condamnables d’un côté que de l’autre, même si les gens de la haute en prennent quand même une bonne dose. J’ai bizarrement repensé à un fauteuil pour deux avec Eddy Murphy et Dan Aykroyd où, de la même manière, deux richards parient sur leur capacité à faire du péquin moyen, un membre à part entière de leur petit monde étriqué.
Je ne garde par contre pas un immense souvenir des numéros musicaux dont je n’ai pas saisi la pertinence. Les mélodies sont, à peu de choses près, assez anodines et ne frappent pas la mémoire comme peuvent le faire celles de, par exemple, Singin’ In The Rain. Mais ce n’est que pure forme car pour le reste, le film est peuplé d’acteurs qui fleurent bon le cabotinage sans outrance et pratiquent l’amusement contagieux. Il y a bien sûr le tiercé gagnant que sont Audrey Hepburn, Rex Harrison et Wilfrid Hyde-White, l’alchimie est évidente et le film lui doit beaucoup. Mais tout de même, le haut du panier restera Stanley Holloway, truculent, énervant en poivrot qui ne pense qu’à délester sa fille du peu qu’elle gagne pour aller picoler. C’est un ivrogne avec une gueule impossible et une bonne humeur qui vient dynamiter toute la bonne tenue du film.
J’appréhende le jour où j’aurai vu tous les films avec Audrey Hepburn, je pourrai les revoir c’est vrai mais comme en amour, il n’y aura plus le charme de la découverte et de la séduction. My Fair Lady l’a faite s’exprimer pleinement, lui permettant de démontrer ses talents d’actrice, de chanteuse et de danseuse. Ce film a une classe infinie, un charme fou et une fougue qui précède de peu celle que j’ai à son égard. Encore une petite chose : il est question de langage dans ce film et croyez-m’en, la langue anglaise, lorsqu’elle est parlée par les Britanniques, est une merveille pour les oreilles qui prend ici tout son sens.