Quiconque a été confronté à la création artistique, en particulier d’un film (ou quiconque vit avec cette personne) ne pourra être que touché, interloqué, amusé et mis en défaut par ce documentaire.
Le film aborde le processus, lent et douloureux, de la création jusqu’à son exploitation du Only God Forgives de Refn. Tous les doutes du cinéaste s’y retrouvent : comment surmonter l’incroyable succès de Drive ? Est-ce que les choix artistiques sont les bons ? Comment se renouveler ? Être plus proche de ses envies quitte à tout risquer pour la radicalité de ses décisions ? Tout ça emballé dans une angoisse profonde et réelle, où l’excitation se mêle à la dépression, maelstrom émotionnel dans lequel la famille de l’artiste ne peut qu’être embarquée.
C’est peut-être le seul point faible du film, réalisé par la femme de Refn mais qui se place pourtant en retrait, témoin à la fois impuissant et essentiel de l’ouragan que provoque le cinéaste à force de vociférations, d’agressivité, de blues et d’envie de tout plaquer alors qu’ils vivent à l’autre bout du monde pour quelques mois encore.
Le film laisse apercevoir la méthode de travail de Refn, de l’écriture au tournage en passant par les réunions surréalistes avec Ryan Gosling, qu’on peine à savoir amusé ou déstabilisé d’être lui aussi à ce point dans l'œil du cyclone.
Pas besoin d’aimer le cinéma de Refn pour apprécier toute la dimension tragico-comique de ce qui se passe à l’écran. Brillant, authentique, à la fois fascinant et amusant, intéressant et un peu effrayant, My life directed by Nicolas Winding Refn est un excellent portait d’artiste en pleine séance de torture, la pire et la plus essentielle qui soit pour lui : la création.