Use Your Illusion.
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Après un Mala Noche libre et fauché suivi d'un Drugstore Cowboy simple mais très efficace Gus Van Sant réalise en 1991 My Own Private Idaho, véritable film culte du cinéma indépendant doublé d'une dimension shakespearienne poignante et redoutablement inattendue.
Si cet objet saisit avant tout par l'originalité de sa mise en scène ( visions oniriques, montage arty, ellipses narratives audacieuses ou encore théâtralité assumée...) l'universalité du propos et celle des thèmes abordés permettent une reconnaissance certaine du spectateur en la figure de Mike ( hallucinant River Phoenix, qui trouve là son plus beau rôle ) jeune gigolo paumé et narcoleptique en pleine quête identitaire.
Jouant énormément sur un style composite, une portée émotionnelle subtilement distillée ainsi qu'un traitement très nuancé des personnages My Own Private Idaho est un pur road-movie américain, évoquant tout aussi bien l'oeuvre littéraire de Jack Kerouac et ses errances faites d'étapes ouvertes sur les rencontres que le cinéma de Dennis Hopper ( Easy Rider principalement, duquel Van Sant reprend le motif du feu de camp ) ou de Wim Wenders ( les séquences de home-movie tournées en Super 8 - flashbacks cristallisant les souvenirs de Mike - renvoient directement à celles du chef d'oeuvre Paris, Texas ) ; en bon film sous influence(s) il fait également écho avec des oeuvres aussi différentes que Orange Mécanique, Bonnie and Clyde ( la scène volontairement rétro du client tatillon et superstitieux au début du métrage reprend le magnifique Deep Night de Rudy Vallee pour une relecture enchanteresse ) ou les films de Fassbinder ( Querelle et son esthétisation proche de l'outrance, L'année des 13 lunes et sa puissance mélancolique prégnante...). L'ombre de Sir Alfred Hitchcock plane également par-delà les nuages, dans cette manière de filmer une scène de contrôle policier sur un tronçon de bitume façon Psychose... sept ans avant son exercice de style de remake plan par plan du classique de 1960 !
Voilà donc un film généreux, délicat et puissamment atypique, réservant de jolis morceaux de bravoure visuelle ( la séquence animée des revues pornos en est un bel exemple, de la même façon que les poses statuaires empruntées par River Phoenix, Keanu Reeves et Udo Kier lors d'une scène érotique syncopée ) et émotionnelle ( la fameuse séquence du feu de camp amenant Mike à déclarer sa flamme à l'impassible et ténébreux Scott ; la scène du double enterrement dans les dernières minutes, d'un beau cachet symbolique...) tout en sublimant les corps et les visages de ses acteurs-modèles. Un grand film.
Créée
le 25 mars 2018
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2 j'aime
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