Les vingt premières minutes annoncent le pire. Manque de rythme, gags tombant quasiment tous à plat, interprétation grossière, le film semble effectivement la purge décrite par la presse et de nombreux spectateurs. Et pourtant, après avoir tutoyé le ridiculement mauvais, le film trouve peu à peu son rythme de croisière et invite le spectateur à rejoindre le délire général. Car, assurément, le film se veut un délire. Certes, bien en-deçà des films de Blake Edwards, mais cette comédie burlesque lorgne évidemment de ce côté-là avec gags grotesques et hymne à la bêtise. Bien entendu, le film ne peut pas plaire à tout le monde. Et je ne suis sorti de l’ensemble que moyennement convaincu. Mais il ne mérite peut-être pas un tel déversement de haine. Derrière ce résultat se trouve une véritable intention. Et qu’on l’aime ou pas (le Clavier-bashing retire aussi beaucoup de lucidité à certains), quand Christian Clavier, à l’écriture, est associé à Jean-Marie Poiré et à Jean-François Halin, cela ne peut pas être totalement mauvais.
En revanche, la réalisation de Nicolas Benamou est plus discutable. Si, dans le rythme, il tente de se rapprocher de ce qu’aurait pu faire Jean-Marie Poiré (qu’on aurait quand même préféré voir derrière la caméra), techniquement ça coince souvent. La lumière est douteuse, les faux raccords sont à la pelle, les reflets dans les carrosseries sont mal appréciés (mais, bon sang comment ne peut-pas voir que tous les techniciens se voient dans le reflet ???). Les coups d’esbroufe ici ou là (les split-screen pour ne citer qu’eux) ne dissimulent rien, bien au contraire. Le casting lui-même, pourtant excellent sur le papier, aurait mérité d’être davantage dirigé. Or ce n’est pas franchement le cas. Si un des personnages a une drôle de voix ou un accent très prononcé, c’est amusant. Mais cinq, ça fait franchement beaucoup. Il aurait fallu mettre un peu d’ordre là-dedans.
Par ailleurs, de nombreux personnages sont sacrifiés ou mal exploités. Curieusement, Benoit Poelvoorde est plutôt discret. Thierry Lhermitte est de passage. Rossy de Palma, Vincent Desagnat ou Gil Alma font acte de présence comme s’il fallait multiplier les suspects potentiels. Gérard Depardieu, en revanche, qui a un rôle secondaire est excellent. Sa présence à l’écran est vraiment optimisée et aurait dû montrer la voie pour d’autres personnages. L’intrigue policière prétexte est terriblement mauvaise. Or il aurait fallu la travailler davantage pour qu’elle serve bien mieux la comédie. Ce n’est pas aussi mauvais qu’on le dire, c’est parfois amusant, souvent plaisant, mais cela manque de rigueur dans beaucoup trop de domaines pour être tout à fait satisfaisant. Dommage.