Quelles sont les causes exactes ? Difficile à dire, surtout que les personnes qui peuvent témoigner ne courent pas les rues (elles préfèrent les profondeurs des océans). Voilà pourquoi on ne cause pas trop ici.
Ce court métrage (13 minutes) illustre les souvenirs d’ivresse des profondeurs du plongeur Guillaume Nery. Bien évidemment, on pense à Luc Besson (Le grand bleu - 1988), mais Julie Gautier, la réalisatrice, ne cherche pas la comparaison. Tout en explorant le même milieu, elle colle à l’expérience particulière de son personnage (Guillaume Nery, très concentré dans son propre rôle) en jouant la carte du documentaire à tendance fantastique.
Le personnage c’est donc Guillaume Nery (crédité également pour la réalisation), spécialiste de la plongée en apnée, marqué par ses tentatives d’aller au plus profond. Le film fait parfaitement sentir l’effort de la descente avec la recherche de l’absolu et le danger qui l’accompagne. Car il ne suffit pas de plonger, encore faut-il parvenir à remonter avant que les poumons explosent. C’est là qu’intervient le phénomène qui intéresse aussi bien Julie que Guillaume. Quand la surface reste à une distance incertaine et que le cerveau lui-même souffre, tout peut se passer.
Le film joue avec maîtrise sur beaucoup de tableaux. D’abord, il explore le milieu aquatique avec bonheur (couleurs, fluidité, sensations, mouvements) et une réelle volonté esthétique (chorégraphies) mise en valeur par la BO originale signée Laurent Parisi. Ensuite, il fait bien sentir les efforts du plongeur qui, à force de chercher ses limites risque de se perdre dans l’immensité du milieu qu’il affronte avec respect. Enfin, il montre de manière impressionnante comment l’esprit du plongeur peut dériver pendant cet effort où il reste seul avec lui-même. Les secondes s’étirent alors à l’infini (ce que le montage met en évidence) et on peut s’interroger sur la nature de ce qui lui passe par la tête. Souvenirs comparables à ceux qui défilent parait-il au moment de la mort ? Imagination débridée à tendance onirique ? Fantasmes ? La réalisation (qui intègre de l’animation) immerge complètement le spectateur dans cette lutte du plongeur pour conserver la maîtrise de son corps en rationalisant ses efforts.
Les effets psychotropes de l’eau ? Cherchons plutôt du côté de l’oxygénation du cerveau. La force de ce film vient de sa recherche esthétique, de sa capacité à surprendre et de son format court qui permet de maintenir l’intérêt du spectateur de bout en bout.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Courts métrages
Créée
le 21 févr. 2016
Critique lue 619 fois
14 j'aime
D'autres avis sur Narcose
Du même critique
Parce qu’elle le vaut bien
Phil Connors (Bill Murray) est présentateur météo à la télévision de Pittsburgh. Se prenant pour une vedette, il rechigne à couvrir encore une fois le jour de la marmotte à Punxsutawney, charmante...
Par
le 26 juin 2013
114 j'aime
31
Vol dans un nid de coucou
L’introduction (pendant le générique) est très annonciatrice du film, avec ce petit du coucou, éclos dans le nid d’une autre espèce et qui finit par en expulser les petits des légitimes...
Par
le 6 nov. 2019
79 j'aime
6
OTAN en emporte le vent
L’avant-première en présence de Bertrand Tavernier fut un régal. Le débat a mis en évidence sa connaissance encyclopédique du cinéma (son Anthologie du cinéma américain est une référence). Une...
Par
le 5 nov. 2013
78 j'aime
20