Nausicaä de la vallée du vent
7.9
Nausicaä de la vallée du vent

Long-métrage d'animation de Hayao Miyazaki (1984)

Second film de Miyazaki, Nausicaä de la vallée du vent, adaptation du manga du même nom, montre les débuts du réalisateur dans sa grande carrière des films d'animations japonais. Fondateur du studio Ghibli avec Takahata en 1985, ce film marque le début de son ascension vers le sommet.


Que dire. Le manga est exceptionnel. Ses diverses intrigues, son univers, son rythme, il rentre largement dans mes préférés, aux côtés de Strongest legend Kurosawa et Liar Game. L'aventure de Nausicaä, en 7 tomes, est riche et complète, complexe et touchante.
Mais son adaptation en film frôle la catastrophe. Comment, en seulement deux heures, peut-on retranscrire les aléas et enjeux ayant marqué le manga ? Comment peut-on mettre en place la même ambiance, la même complexité ? C'est impossible. Il aurait fallu faire une série de film, une trilogie par exemple, comme le Seigneur des Anneaux (il m'arrive assez souvent de comparer le manga aux films, qui se ressemblent en bien des points). Ou alors en faire une série animée, autre solution. Deux heures, ça n'est pas assez, c'est beaucoup trop peu pour un monument comme Nausicaä.


Certes, les graphismes sont magnifiques. Les décors défilent sous nos yeux avec une beauté époustouflante, les paysages sont réussis et arrivent à repeindre l'univers du manga. Et dire que ses autres productions sont encore meilleures... en plus, l'animation n'a rien à reprocher. Les cascades dans les airs sont fluides, les mouvements ne sont pas saccagés. Ils s'harmonisent avec les décors, et ne créent pas une rupture avec les fonds.


Mais ! On s'arrête là. Bien malheureusement.
Je vais commencer par l'arrière thème écologiste. Lui qui passe si bien dans le manga, à tel point que j'en suis venu à l'oublier, dans le film certains dialogues font mal aux dents ("Quand l’homme rompt l’équilibre du monde, la forêt fait d’énormes sacrifices pour rétablir cet équilibre", etc). Pas besoin de réfléchir plus de deux secondes pour comprendre ce qui en retourne, nous sommes directement visés. Malgré un thème toujours d'actualité 40 ans plus tard, il est dommage que le message soit beaucoup trop explicite (il me dérange personnellement même en étant implicite, donc bon... j'aime une oeuvre pour sa complexité, son originalité, pas son message).
En plus, c'est la même chose pour les dialogues sur la paix, la non-violence, et tout ce bordel là. Tant de mots sur la compassion, l'amitié, tant de mots si peu crédibles lorsque Nausicaä tue les tolmèques (ou maîtres vers, c'est pas précisé). C'est dommage, on peut se dire qu'elle a un motif valable mais les autres n'en ont-ils pas également un ? Mais comme on ne voit les choses que d'un seul côté, c'est normal. Finalement, Nausicaä reste plutôt égoïste, à ne penser qu'à elle même en pensant aux autres.


Si le message m'a dérangé dans le film mais pas dans le manga, c'est sans doute à cause de l'univers. Celui du film n'est qu'éraflé par rapport à celui du manga. Kushana n'a plus de frères, Jill meurt... tué ? Il faudra qu'on m'explique, ça. Le dieu guerrier, on ne le voit que le temps d'une minute ou deux ; pour quoi ? Pour rien. Je sais qu'il est impossible de regrouper tous les éléments du manga dans un ridicule film de deux heures, mais c'est parce que le film ne dure que deux petites heures que l'ambiance, l'univers et les personnages ne sont plus les mêmes.


Aussi, le personnage n'évolue pas. Pas la peine de chercher ou de trouver une excuse, non non, le personnage n'évolue pas. Nausicaä aura été la même du début à la fin. Toujours la même fille, courageuse, pleurnicharde, prête à tout pour protéger les siens. Contrairement au manga, dans lequel on voit clairement l'héroïne prendre en maturité, ici... bon, elle n'aura pas changé. Aucune évolution, aucun changement dans son caractère, toujours... la même.


Toujours la même, car franchement, on s'ennuie devant ce film. Le rythme est lent ; très lent. Le début passe bien, il y a assez d'événements pour qu'on s'accroche, mais dès que Nausicaä se crache, c'est la catastrophe. Un des avantages du manga est les différentes intrigues, se déroulant à plusieurs endroits différents. Ça nous évite de ne suivre qu'un seul fil directeur, et permet un meilleur développement de l'univers. Mais Miyazaki a oublié une chose : en changeant un peu les événements, et en raccourcissant son oeuvre en deux heures seulement, à chaque changement de point de vue on ralentit de plus en plus. Alors donc on s'étonne que les personnages stagnent. Ils ne font rien, donc comment peuvent-ils évoluer ?
Car au final, que s'est-il réellement passé ? Y'a-t-il eu une quête, ou quelque chose dans ce genre ? Le film aboutit-il à quelque chose ? Non, malheureusement non. Désolé Miyazaki, mais à vouloir raccourcir et modifier ton oeuvre, elle perd sa forme, et en qualité bien sûr. On voit que tu as essayé de regrouper un maximum d'éléments du manga, mais à trop forcer, ça déborde.


Voilà, encore désolé, Miyazaki. Et désolé à ceux qui ont aimé le film et lisent cette critique. Haha, je me désole même moi-même. Enfin bon, c'est vraiment dommage qu'en seulement deux heures le réalisateur ait décidé de retranscrire son manga. Il aurait pu faire beaucoup mieux en plus long, mais bon, tant pis. On ne retrouve plus rien de ce que propose l'œuvre originale, c'est regrettable. On a rarement carte blanche au commencement... aaaaaahhh, bon, plus qu'à espérer une suite ? Une réadaptation ?

Japonirisme
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le 11 janv. 2021

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