Du registre de l'absurde, Alex van Warmerdam est assurément l'un des maîtres, à l'instar de ses confrères nordiques, Bent Hamer et Roy Andersson (il y en a d'autres). Son dixième film part sur des bases classiques : des répétitions de théâtre avec un acteur qui couche avec la femme de son metteur en scène, jusqu'à ce que la fille du comédien lui apprenne qu'elle a découvert qu'elle n'a qu'un seul poumon. A partir de là et d'un mot prononcé par un inconnu sur un pont, le film bascule dans un tout autre univers, de science-fiction, si l'on veut, quoique avec le cinéaste néerlandais, rien ne soit jamais sûr. Ce qui est frustrant dans Nr. 10 est que cet aspect fantastique n'intervient qu'assez tard et ne connait pas un développement suffisant. C'est bien ce qu'a souhaité van Warmerdam, une entreprise de déstabilisation qui s'adresse non à notre raison mais à notre imagination, dans ce qui est sans doute une attaque de la religion catholique, mais bien évidemment, rien n'est moins sûr, etc, voir plus haut. Les amateurs de cinéma bien carré et où rien d'inexplicable n'arrive en seront pour leurs frais. Pour les fidèles du réalisateur de Borgman, c'est une pierre de plus à l’œuvre inclassable d'un artiste dont on se demande encore par quel miracle il arrive encore à trouver des financements pour donner vie à ses délires froids. A se demander s'il ne vient pas d'une autre planète (clin d’œil à Nr. 10, sans trop spoiler)