New York, de nos jours. Dan Mulligan et Gretta James sont tous les deux au fond du trou. Lui a été viré de la boîte de production qu’il avait lancée, elle a perdu son petit ami, son seul amour, et est sur le point de retourner à Londres, sa ville. La veille de son départ, elle se lance, forcée par son ami Steve, lors d’une scène ouverte dans un bar. Émergeant de l’alcool le temps d’une chanson, Dan Mulligan comprend immédiatement le potentiel du morceau et veut produire l’album de Gretta. Mais, n’ayant nulle part pour enregistrer, ils se retrouvent obligés de composer un petit orchestre pour créer cet album dans les rues de New York. Un projet séduisant qui prend vite forme.
Au début, le ton est léger. Les scènes insolites se poursuivent, construisant petit à petit une sorte de film à sketch, en quelque sorte. Mais cette appellation perd tout son sens face à un bijou de virtuosité de la part du réalisateur, John Carney. La scène dans laquelle on voit Dan Mulligan (Mark Ruffalo) imaginer l’ajout d’instruments à un morceau modestement joué à la guitare par Gretta James (Keira Knightley) est assez magistrale. D’un seul coup, le film entre dans une autre dimension. Assez vite, finalement, le ton comique n’ayant pas eu le temps de vraiment s’installer et de prendre le pas sur les personnages.
Malheureusement, les flashbacks avec Adam Levine, qui a pour principale tare, en plus de sa moustache, d’être leader de Maroon 5, sont souvent longuets et peu intéressantes. Elles permettent certes de comprendre un peu plus l’histoire de Gretta mais n’ont pas la force et la profondeur des séquences avec Dan. Celles-ci se font d’abord secondaires, après la rencontre entre les ce dernier et Gretta, puis redeviennent une part importante du film, à partir du moment où se lance la réalisation de l’album. On voit alors se développer une belle histoire, de laquelle la musique ne s’éloigne jamais vraiment. John Carney ne cherche jamais à arracher l’émotion chez le spectateur, il la crée vraiment. Ce ne sont pas des stratagèmes qui font penser que ce film est de qualité, c’est qu’il est vraiment de qualité.
Très bien filmé, New York Melody offre un des pans de la vie new-yorkaise qui font le plus rêver, à savoir l’animation urbaine, notamment à travers la musique. On a tous en mémoire ces images de groupes jouant dans les parcs ou dans le métro. Ici, c’est presque un hommage à ces artistes de l’ombre, à travers un album à gros potentiel enregistré comme tous ces petites scènes publiques. On rapproche le musicien professionnel de l’artiste de rue par l’intermédiaire du personnage de Mark Ruffalo. John Carney est un habitué, puisque son Once avait déjà été mis en scène dans une ville particulièrement musicale, Dublin, et avait raconté l’histoire de deux musiciens dans les rues de la capitale irlandaise. La rue est à la base de toute création de nos jours, et le réalisateur l’a bien compris. Son talent ne s’illustre d’ailleurs jamais mieux que lors de ces scènes de musique, qui surpassent en émotion et en puissance toutes les autres.
Les images de la vie urbaine, magnifiques, montrent New York sous un nouvel angle, un angle encore plus séduisant que bien d’autres qui l’étaient pourtant déjà. Empli d’espoir mais n’entrant jamais dans le dangereux piège que représentent la bien-pensance et l’hypocrisie, New York Melody est un beau film, ainsi qu’un vibrant hommage à New York et à la musique, tous deux si liés que le sujet de ce long-métrage semble finalement tout à fait logique. La musique et New York, c’est toute une histoire. New York Melody est cette histoire.